Les marchés semblent avoir clôturé un cycle haussier de 10 ans qui s’est caractérisé par l’inflation du prix des actifs du fait des différentes politiques non conventionnelles des banques centrales. Or depuis septembre, les opérateurs ont pris conscience que nous basculons dans un nouveau monde, ou plutôt que nous retournons vers un monde ancien, « normal », sans « quantitative easing », où le risque doit être rémunéré à sa juste valeur. Changement de paradigme, les banques centrales ne seront donc plus présentes en cas de forte baisse des marchés, et comme le souligne Warren Buffet, c’est lorsque la mer se retire que nous découvrons les baigneurs sans maillot de bain…
Les gagnants de ce retournement ne peuvent bien évidement pas être les mêmes que ceux de la phase précédente. L’écart de performances entre les valeurs de croissance, portées aux nues ces dernières années mais fortement attaquées ces derniers mois, et les valeurs dites « values » ont atteint des niveaux qui interpellent. La volatilité, écrasée par des torrents de liquidité, refait son apparition.
Pour autant, il ne s’agit pas d’un « retour vers le futur » en l’année 2001. Les bilans des entreprises sont sains. L’évolution des règles comptables, post bulle internet, nous mettent à l’abri des montages fantaisistes par acquisition avec un empilement de goodwill incontrôlables et les dettes qui vont avec ; les réglementations prudentielles bancaires, post 2008, puis 2011, se sont considérablement renforcées. Pour autant, si les entreprises et les banques ont retenu la leçon, en est-il de même pour les investisseurs ?
Alors que faire pour limiter la baisse lorsque nous sommes obligés d’être investi sur les actions ?
Retournons donc aux fondamentaux : pour un actionnaire minoritaire, le prix d’une action n’est autre que la valeur actualisée des dividendes futures.
Or les dividendes, véritables instruments de communication de l’entreprise vis-à-vis de ses actionnaires, sont bien moins volatils que les bénéfices et bien mieux pilotés en phase de récession, ce qui donne un caractère défensif à ce type de stratégie.
Je vous l’accorde, tout ceci est bien moins glamour que le « story telling » des entreprises de la Silicon Valley qui croissent à grande vitesse, mais dont la rémunération de l’actionnaire ne repose que sur l’espoir de plus-values confortables. Vous avez dit 2001… ?
Pour paraphraser la formule célèbre attribué à Herriot, le dividende est un peu comme la culture : c’est
ce qui reste quand on a tout oublié. Quant aux entreprises distributrices de dividendes, les
investisseurs les ont effectivement abusivement délaissées ces dernières années, à tel point qu’elles
sont au cœur des stratégies de gestion « value ».
Qui sont-elles ? Des entreprises appartenant en général à des secteurs dont l’activité est pérenne,
dans des marchés présentant des barrières à l’entrée, sur des secteurs établis de longue date… tout en
gardant des capacités de transformation. Ainsi les services aux collectivités, tout en inventant la ville durable de demain, se caractérisent par des bilans sains, et une récurrence des revenus permettant de
générer des rendements de …. 5,5%, idem pour les secteurs de l’assurance, ou des médias qui peuvent
parfois atteindre des rendements de 6,5% voire 7%.
Ces rendements paraissent si élevés en comparaison des signatures « investment grade » équivalentes qu’il est légitime de s’interroger sur les causes de ces niveaux atteint. Est-ce parce que le dividende est élevé ou parce que le prix est trop bas ?
En réalité le dividende croit avec modération, gouvernance oblige, en conclusion c’est souvent la sous valorisation patente du titre qui justifie le rendement. Vous avez dit « value » … ?
Mais si le prix chute est-ce pour une bonne ou une mauvaise raison ? Si c’est pour une bonne raison le
paiement du dividende futur n’est donc pas garanti, alors que si c’est pour une mauvaise raison (une
surréaction de marché), alors nous avons un point d’entrée. Identifier le prochain dividende et évaluer
sa probabilité à être effectivement payé est au cœur de processus de gestion du fonds CPR Euro High
Dividend qui devrait délivrer un rendement de 6% en 2019. Sélectionner des titres « value » à
dividende élevé et pérenne, oui… mais uniquement avec un bilan de qualité.
Mais en période de hausse des taux quel avenir pour ce type de stratégie pourriez-vous m’objecter ?
Répondre à cette question revient à prédire de quel taux de croissance : celui des dividendes, ou celui
des taux d’actualisation, croîtra le plus rapidement. Ou encore : pour quelles raisons les taux vont-ils
monter et quels en seront les impacts sur les résultats des entreprises ?
Si la croissance, que nous anticipons en décélération mais toujours présente en 2019, génère une faible inflation, alors les résultats nominaux des entreprises vont augmenter et avec eux les dividendes distribués. Simultanément une politique de normalisation correctement anticipée par les investisseurs et contrôlée par la BCE fera augmenter modérément les taux. La hausse des dividendes l’emportera sur la hausse des taux d’actualisation, la stratégie continuera de surperformer.
Pour 2019, la stratégie haut dividende est donc une alternative intéressante dans le cadre d’une gestion action défensive dans un marché volatile.