Selon Luc Hazoume, dans un contexte où l’économie réelle ne semble guère optimiste, nous assistons aux prémices de nouvelles bulles spéculatives. Décryptage...
L’absence de signes tangibles de reprise de l’économie réelle face à la flambée des prix des matières premières ont fait de l’année 2009 une année singulière. Il suffit d’observer la variation annuelle des prix des métaux précieux (+124% sur le palladium, +60% sur le platine) ou des « soft commodities » (+29% sur le cacao, +11% sur le maïs) pour s’en convaincre. L’or (+35%) n’est pas en reste, même si une explication partielle de cette hausse réside dans les politiques monétaires des Etats, soucieux de constituer des réserves et ainsi de se protéger contre une chute du dollar. Dans le même temps, les indices boursiers ont quasiment tous connu une croissance importante (+26% sur le S&P 500, +23% sur l’EURONEXT 100, et un étonnant +56% sur le Hang Seng). Pour ce qui est des devises, les « carry trades » se sont déplacés vers les rares devises qui maintiennent des taux d’intérêts élevés (NZD, AUD, TRY).
Aujourd’hui les devises du G5 offrent des taux d’intérêts très bas et se muent donc en devises de financement potentielles et toutes les classes d’actifs, que l’on pressentait autrefois comme concurrentes dans le cœur des investisseurs, semblent aujourd’hui croitre ensemble. Ces bulles spéculatives proviennent vraisemblablement de l’excès de liquidités présent sur les marchés financiers.
La situation interbancaire s’est détendue depuis le plus fort de la crise (été 2008), et les établissements de crédit jouissent maintenant de trop de liquidités et prêtent à perte : l’EONIA est environ 60 points de base en dessous du taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne. Bien que les spreads de crédits se soient resserrés, l’économie réelle ne bénéficie pourtant pas de plus de financement qu’au plus fort de la crise, et les spéculateurs (banques et hedge funds), qui affichent des performances records, semblent bien être les principaux bénéficiaires de la crise.
On ne peut donc exclure de grosses corrections sur les marchés financiers en 2010, et possiblement dans toutes les classes d’actifs (matières premières, actions, devises). Cependant les marchés financiers ne sont pas inéluctablement dangereux, il existe des instruments pour se protéger des variations indésirables, ou profiter des opportunités. Dans un contexte de volatilité aussi élevée, aucune entreprise ne peut faire l’impasse sur une gestion active de ses risques servie par des outils pointus. Valoriser précisément ses instruments financiers, mesurer et gérer ses risques, se donner les moyens d’une vision claire pour prendre les bonnes décisions seront les enjeux clés pour une année 2010 sereine.