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De la place pour le premium allemand face à Tesla

Le Pricing Power des constructeurs automobiles premiums allemands reste intacte. De quoi leur donner le temps et les moyens d’accélérer leur rattrapage dans l’électrique, en dépit d’un retard bien réel. Par Gérard Moulin, Responsable pôle actions européennes et gérant du fonds Pricing Power...

Beaucoup a été dit sur le retard des industriels allemands en matière de voiture électrique. Devancés par Tesla, ils auraient raté le coche, voire seraient condamnés à un lent repli. Certes, leur retard est réel. Centré sur le moteur thermique, dont les performances leur ont permis de dominer le marché mondial pendant de longues décennies, leur outil industriel est encore loin d’intégrer les technologies nécessaires à leur transformation vers l’électrique (batteries, logiciel, semi-conducteurs…). Pour autant, les marques premiums allemandes restent bien placées pour capter la demande de demain, voire pour s’imposer dans ce monde automobile en pleine mutation.

Une valeur de marque intacte et toujours aussi forte

Les raisons de cet apparent paradoxe sont à chercher du côté des véritables critères d’achat d’un véhicule. Car au fond, que cherchent les clients ? Quelle est leur motivation, alors que l’environnement routier restreint les limitations de vitesse et démonétise de fait une grande partie de la proposition de valeur des constructeurs allemands, qui repose sur la puissance de leurs moteurs ? Les mêmes conclusions reviennent à longueur d’études : les clients recherchent avant tout une image de marque, du confort, de la qualité, du service et une forte valeur de revente. Autant de critères sur lesquels le premium allemand continue de conserver une très forte longueur d’avance.

Et celle-ci pourrait bien s’avérer discriminante, dans le contexte actuel de recomposition du secteur. Alors que les constructeurs plus généralistes ont tout à craindre de cette nouvelle donne dans l’électrique, la valeur de marque toujours intacte des constructeurs premiums allemands donne à ces derniers le temps de rattraper leur retard industriel pourtant bien réel.

Avec près de 1% de part de marché mondial, Tesla ne pourra pas en effet être en mesure de rafler la mise avant une dizaine d’années, même en affichant une croissance de 50% par an. En clair, les constructeurs premium allemands ont dix ans pour rattraper leur retard. Et ils en ont les moyens.

Le Pricing Power rend les clients indulgents et patients

Leur Pricing Power n’a en effet cessé de se renforcer au cours des dernières années, gonflant d’autant leur capacité à investir. Qu’on en juge. Début novembre, BMW a annoncé que le prix moyen de ses véhicules avait atteint 52.000€, soit 8.000€ à 10.000€ de plus qu’auparavant. Une performance qui lui a permis d’afficher une hausse de son chiffre d’affaires de 3% sur la période, en dépit d’une baisse des volumes de 13%. Même constat du côté de Mercedes, dont la baisse de 30% du nombre de véhicules vendus sur la même période n’a pas empêché une légère progression du chiffre d’affaires.

Ce dont ce Pricing Power témoigne, c’est de la volonté intacte des clients de payer un prix élevé pour ce qui compte vraiment pour eux tout en restant indulgent sur le reste. Une lacune en matière d’efficacité industrielle ne fera ainsi qu’accroître le délai d’attente, sans pour autant enrayer les ventes. Un exploit hors d’atteinte pour un constructeur généraliste, dont toute défaillance risque de détourner le client au profit du marché secondaire. Il en va de même pour un grand nombre de marques positionnées sur le segment du Premium sans en avoir le Pricing Power, comme les récents déboires de Jaguar en témoignent.

Une exception spécifiquement allemande

Ce Pricing Power est donc une donnée spécifiquement allemande. Le fait que Tesla ait choisi l’Allemagne pour installer sa mégafactory européenne est de ce point de vue révélateur. Il témoigne de la confiance du pionnier emblématique de la voiture électrique dans l’excellence du pays en matière d’ingénierie automobile.

Cette transformation ne se fera certes pas sans restructurations importantes du tissu industriel. Mais le fait est qu’en dépit de leur retard, les constructeurs Premium allemands conservent toutes les cartes en main pour continuer de dominer le marché mondial dans les décennies à venir. Ils en ont à la fois le temps et les moyens.

Gérard Moulin Janvier 2022

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