La situation actuelle est encourageante, l’inflation reflue et l’activité faiblit graduellement sans pour
autant entraîner de véritable récession. Les banques centrales ont arrêté d’augmenter leurs taux
directeurs et les observateurs anticipent déjà leur reflux. L’espoir d’un moindre coût du crédit a
déclenché un regain d’intérêt pour les actions et les principales places financières ont enregistré
une progression conséquente de leurs indices sur les dernières semaines.
Et cependant, les investisseurs demeurent perturbés par plusieurs contradictions apparentes.
Prenons par exemple les États-Unis. Pourquoi une hausse des taux soutenue, mise en œuvre de façon accélérée, après plus de 10 ans de taux particulièrement bas, n’a-t-elle pas entraîné un ralentissement plus notoire de l’activité ? Pourquoi la hausse des prix n’a-t-elle pas été relayée par un accroissement plus marqué des salaires ? Pourquoi le pouvoir d’achat n’est-il pas plus dégradé alors que de nombreux prix ont fortement progressé ?
Plusieurs éléments de réponse peuvent apporter un certain éclairage. Les tendances restrictives provoquées par la progression des taux ont été en partie neutralisées par le considérable déficit budgétaire décidé par l’administration Biden. D’autres pays en Europe, comme la France, ont également opté pour un soutien indirect de leur économie à travers un déficit budgétaire accru. Plusieurs économistes estiment que la faible hausse moyenne des salaires constitue la preuve d’une inflation quasi inexistante. En effet, seule l’intervention de cette courroie de transmission conduit à une hausse généralisée des prix. La capacité d’ajustement des salaires à l’accroissement des prix est-elle simplement très progressive ou définitivement stoppée, entérinant une dégradation corrélative du pouvoir d’achat qui devrait se manifester et contribuer à freiner l’économie ?
Le relatif maintien du pouvoir d’achat, suivant les pays, peut sembler paradoxal. Est-ce l’épargne
disponible et les aides variées qui colmatent les insuffisances, ce qui signifierait que l’effet récessif
n’a pas encore eu le temps de pleinement s’exprimer ? La moyenne cache-t-elle des situations très
disparates, dont certaines sont en réalité particulièrement éprouvantes ?
Pour l’instant, les entreprises – qui sont à l’origine des deux tiers de l’inflation enregistrée – ont
affiché des résultats satisfaisants du fait de hausse de tarifs sur fond de volumes au mieux constants.
Avec la baisse des taux longs favorable à la valorisation des actions, on comprend le comportement
flamboyant des indices. Cependant, si les volumes ne peuvent que refléter – tôt ou tard – une
diminution du pouvoir d’achat, il se pourrait que les marges des sociétés, sans nouvelle
compensation tarifaire, se trouvent affectées. La dynamique haussière serait-elle remise en cause
prochainement ?
Des zones d’ombre demeurent et il peut sembler un tantinet optimiste d’espérer que l’inflation
disparaisse et que l’économie ralentisse sans que le pouvoir d’achat des consommateurs et les
résultats des entreprises n’en supportent les conséquences.
Au final, l’arithmétique pourrait difficilement s’accommoder des contradictions qui permettent à ce
jour de maintenir un équilibre instable, en pratiquant simultanément une politique monétaire
restrictive et une politique budgétaire très complaisante. Il faudra choisir et si les politiques n’ont
pas le courage d’adopter une direction claire, l’économie finira sans doute par faire une synthèse
dont les résultats ne seront pas nécessairement les plus cléments.
L’impact d’un endettement démesuré des états, sans cesse escamoté jusqu’à ce jour, pourrait montrer prochainement ses limites. À court terme, le dollar devrait connaître des fragilités annonciatrices d’une suprématie nettement remise en cause. À plus long terme, les jeunes générations pourront à juste titre honnir leurs pères.
Dans ce climat d’incertitude et de confusion, les équipes d’Optigestion s’efforcent de prendre un certain recul sur les événements, de regarder le monde réel tel qu’il est, de faire preuve de bon sens.