Ces dernières années, le quotidien des investisseurs a été fait de conflits commerciaux et de tensions internationales. Ces mauvaises nouvelles ont éclipsé les progrès conséquents que la Chine a réalisés en matière de marchés de capitaux, des progrès qui ont rendu le pays particulièrement intéressant pour les investisseurs étrangers.
Ces dernières années, les programmes Stock Connect et Bond Connect ont permis un accès de plus en plus large à l’univers des actions A. Le nombre d’actions concernées par ce flux « sud-nord » [1] est passé d’environ 500 au lancement à environ 1 600 aujourd’hui, et concerne désormais de nombreux grands noms nationaux et internationaux. [2] Nous avons également noté la proposition d’assouplissement des règles QFII (Qualified Foreign Institutional Investor, ou investisseur institutionnel étranger qualifié) [3], qui supprime les quotas, simplifie les exigences réglementaires et élargit l’accès au marché des instruments dérivés. En outre, la Chine a autorisé des sociétés de gestion de titres comme JP Morgan et Goldman Sachs à détenir des filiales à 100% qui chercheront à améliorer la qualité et la solidité des marchés de capitaux dans leur ensemble. Ce ne sont là que quelques évolutions qui offrent, selon nous, un contexte favorable à l’investissement en Chine au cours de la décennie à venir.
A la fin de l’année 2020, la Chine a présenté son quatorzième Plan quinquennal, qui sera finalisé en mars 2021. L’un des principaux thèmes sera le concept de « circulation duale ». L’objectif est de trouver un équilibre entre accent renouvelé sur la circulation intérieure (l’idée étant de stimuler la consommation intérieure et de favoriser l’autonomie en matière de technologie et de chaînes logistiques) et circulation extérieure (ce qui souligne l’importance de la poursuite de l’intégration à la communauté internationale pour le commerce et les marchés de capitaux).
Le secteur de la santé constitue un bon exemple de cette orientation et des opportunités d’investissement qu’il crée. Compte tenu des tendances démographiques, il est quasiment certain que la population chinoise sera demain plus âgée et plus riche qu’aujourd’hui, ce qui alimentera une demande significative en matière de santé et de bien-être de la part des consommateurs et des pouvoirs publics. Une série d’actions qui vont changer la donne du côté de l’offre viennent compléter ces éléments liés à la demande : l’accent placé par le gouvernement sur la mise au point de médicaments innovants, l’accélération des autorisations et des remboursements de médicaments par l’équivalent chinois de l’Agence européenne des médicaments (EMA) grâce à un raccourcissement du processus (passé de cinq ans à un an), l’assouplissement du financement des start-up biotechnologiques, y compris la possibilité de cotation en bourse avant qu’elles ne réalisent des bénéfices, et l’adhésion de la Chine à l’ICH (le Conseil international d’harmonisation des exigences techniques pour l’enregistrement des médicaments à usage humain, sorte d’agence des agences des médicaments) en 2017 [4], une adhésion équivalente, pour la santé chinoise, à l’entrée du pays dans l’OMC.
Les investissements en capital-risque ont explosé, passant de moins de 1 milliard de dollars en 2013 à plus de 11 milliards de dollars en 2018 [5]. Plus de 30 sociétés ont ainsi été inscrites à la cote. [6] Plus de 80 médicaments mis au point à l’étranger par des géants biotechnologiques mondiaux ont été autorisés en Chine, contre environ 10 en 2014 [7] et une forte accélération des licences accordées aux Etats-Unis et en Europe à des médicaments innovants conçus en Chine a également été constatée. Contrairement à ce qui se produit dans d’autres secteurs, le contexte n’a jamais été aussi favorable à la coopération internationale et, élément particulièrement intéressant pour les investisseurs, il n’a jamais offert d’opportunités aussi intéressantes.
L’investissement direct dans les médicaments et les dispositifs médicaux constitue bien sûr une opportunité très intéressante. Nos équipes de recherche ayant suivi une grande partie des médicaments autorisés depuis leur lancement et comprenant parfaitement le paysage concurrentiel mondial, nous disposons d’un formidable avantage sur nos concurrents. Il existe cependant d’autres façons de profiter de cette révolution, par exemple en investissant dans le façonnage pharmaceutique, domaine dans lequel la Chine a bâti de véritables leaders mondiaux. En outre, les modèles économiques chinois, tous secteurs confondus, sont probablement parmi les meilleurs au monde. Les façonniers interviennent de la découverte du médicament jusqu’aux essais cliniques et à la production. Compte tenu de la valeur ajoutée élevée de leur travail, ils peuvent recevoir des participations et des paiements d’étape. Pour utiliser une comparaison avec la ruée vers l’or, si les sociétés de biotechnologie sont les chercheurs d’or, les façonniers sont les fabricants de pelles : ils sortent gagnants, peu importe quel mineur trouve de l’or.
Un autre sous-secteur particulièrement intéressant est celui du dépistage précoce et du diagnostic. Le vieillissement de la population en Chine, conjugué à une infrastructure sanitaire inadaptée, met en avant deux éléments : d’une part, une volonté de repérer les maladies telles que le cancer au plus tôt, voire avant qu’elles ne se déclarent, ce qui permettra d’obtenir de meilleurs résultats et de réduire les coûts par rapport aux traitements nécessaires lorsqu’elles sont prises plus tard ; d’autre part, le retard du marché des services de santé chinois sur une grande partie du monde développé (il est très rare d’avoir un médecin de famille et les examens optiques et dentaires très peu répandus). Cela signifie que de formidables opportunités existent en ligne et hors ligne pour répondre à cette demande en devenir.
Conclusion
Les tensions sino-américaines ont effectivement eu des répercussions sur l’économie chinoise, en particulier sur certains pans du secteur technologique. Mais quand une porte se ferme, une autre s’ouvre : certains segments, dont la santé, n’ont jamais bénéficié d’une coopération internationale aussi étroite, tant au niveau des entreprises que des pouvoirs publics.
Nous cherchons à nous éloigner des secteurs où l’incertitude est élevée et à identifier des opportunités attrayantes pour nos investisseurs. Sur le plan de la sélection bottom-up, la situation n’a jamais été aussi propice à l’investissement en Chine et, compte tenu de l’ouverture continue des marchés de capitaux, nous sommes convaincus que les choses n’iront qu’en s’améliorant.