Selon la Fed, l’absence de patience ne signifie pas l’impatience. La stratégie de resserrement est désormais conditionnée à la confiance des banquiers centraux dans un retour de l’inflation à l’objectif de 2%. Le message accommodant de la Réserve Fédérale a provoqué une vague de rachats de positions. Le T-Note est retombé sous le seuil de 2% abandonnant jusque 12pdb immédiatement après la publication du communiqué du FOMC. Malgré une révision des projections de taux Fed Funds de 62,5pdb à la baisse sur 2016, la courbe a repris sa tendance à l’aplatissement. Le dollar a hésité avant de se stabiliser 2% sous son niveau pré-FOMC. Le rally du T-Note a conforté les acheteurs de Bunds au détriment des souverains périphériques et du crédit. Le 10 ans allemand marque de nouveaux points bas historiques à 0,17%. L’aplatissement des courbes core reste un thème majeur du fait des déséquilibres créés par l’action de la BCE. A l’inverse, le high yield a souffert malgré la stabilité des marchés d’actions en Europe.
La Fed revoit ses plans
Les prévisions du FOMC laissent perplexes. La croissance pour les trois prochaines années a été revue en baisse de 0,2-0,3pp à 2,5% environ en 2015-2016 puis 2,2% à 2017 soit le potentiel de long terme. En parallèle, la Fed a abaissé ses prévisions de taux de chômage à court et long terme tout en maintenant quasiment inchangé le profil de l’inflation. En revanche, les projections de taux des membres du FOMC ont sensiblement baissé. Le taux médian a diminué de 2,50% à 1,875% fin 2016 et de 3,625% à 3,125% fin 2017. Le rythme prévu du resserrement monétaire se rapproche ainsi des anticipations de marché. La Fed a aussi insisté sur la faiblesse des exportations – ou le dollar fort - qui freine la croissance au 1T15. C’est sans doute davantage la vitesse de l’appréciation du billet vert qui préoccupe la Fed que son ajustement, qui reflète le nécessaire rééquilibrage de la croissance mondiale vers l’Europe. Concernant les éléments de langage, la ‘patience’ a vécu. Une ‘confiance raisonnable’ dans une remontée de l’inflation vers 2% est désormais jugée nécessaire pour relever les taux d’intérêt. Janet Yellen a cependant indiqué qu’il était improbable qu’un geste intervienne lors du FOMC du 29 avril. A cette date, la Fed aura les premiers chiffres de croissance au 1T15.
Les Banquiers Centraux semblent naviguer à vue, réagissant à l’absence d’accélération des salaires en manipulant le taux de chômage d’équilibre. Une baisse du NAIRU (non-accelerating inflation rate of unemployment) est en général associée à une meilleure allocation des ressources productives et un potentiel d’activité plus élevé. A l’inverse, en réduisant ses chiffres de croissance, la Fed semble faire l’hypothèse que les gains de productivité vont diminuer ou que la baisse de la participation au marché du travail, pourtant imputable pour l’essentiel au vieillissement de la population, va s’accélérer. En conclusion, la stabilité du lien entre le chômage et l’inflation salariale est clé pour la Fed. Le risque est qu’un resserrement tardif encourage la prise de risques financiers déstabilisants pour l’économie américaine.
Signaux encourageants en zone euro
La baisse de l’euro et du pétrole constituent de forts soutiens au consommateur. Les dépenses des ménages sont bien orientées en France et en Allemagne et la stabilisation de l’immobilier entretient la reprise de l’activité aux Pays-Bas et en Espagne. Sur le plan monétaire, 143 institutions ont participé au troisième TLTRO du 19 mars. Le total des emprunts à long terme s’élève à 98mds €. En outre, c’est sans doute le signe que le flux de crédit dans l’économie réelle poursuit son redressement. Les chiffres de M3 attendus cette semaine devraient confirmer l’embellie.
Le T-Note efface 50% de sa correction
Le T-Note a rebondi après le FOMC sur fond de données décevantes décrivant un ralentissement marqué dans la construction résidentielle (mises en chantier, NAHB). Selon les enquêtes, le positionnement vendeur des investisseurs finaux s’était accentué en amont du FOMC. Cela peut expliquer l’ampleur des rachats. Les comptes spéculatifs ont en revanche réduit leurs positions acheteuses et sont désormais proches de la neutralité. Le 10 ans américain cote 1,90% actuellement. Le marché a ainsi effacé la moitié du rebond des taux depuis fin janvier (1,64% à 2,20%). A court terme, les données immobilières et un discours de Janet Yellen viendront conforter ce revirement. Le niveau des rendements (chers par rapport à notre évaluation du 10 ans à 2,37%) nous incite à conserver la neutralité. Le biais à l’aplatissement est conservé d’autant que la révision des ‘dots’ n’a pas déclenché de mouvement de repentification du 2-10 ans.
Sur le marché européen, la pression à la baisse des rendements a repris après le FOMC. Le Bund a marqué de nouveaux sommets au-delà de 159 sur le contrat juin 2015 (159,13 le 18 mars). En termes de rendement, le 10 ans se situe autour de 0,20%. Hormis la BuBa, les flux acheteurs de Bund proviennent principalement des comptes finaux de la zone euro. Sur le plan technique, une zone de vente (157,92-158,85) liée à l’action des prix de la semaine précédente a été invalidée. La configuration technique offre un potentiel haussier vers 159,80 soit l’équivalent de 0,10% sur l’emprunt allemand à 10 ans. Malgré ce signal, nous retenons la neutralité en duration compte tenu des valorisations peu attrayantes. Nous maintenons les positions d’aplatissement du spread 2-10 ans. Le PSPP induit une pression à l’aplatissement liée au choix de maturité, à la contrainte de rendement minium et à la liquidité relative des différents segments de maturités. Nous maintenons la stratégie de resserrement des swaps spreads (ventes d’asset-swaps de Bund 5 et 10 ans) sur des considérations de valorisations autour de 38-40pdb.
Ecartement des spreads souverains
Les spreads souverains peinent à suivre le rally du Bund. La BCE a pourtant acheté quelque 16,6mds € d’obligations publiques en 5 séances (au 18 mars). Cependant, les flux entrants sur les ETFs d’emprunts d’Etats de la zone euro ont décéléré après deux semaines record. Parmi les flux notables, la volatilité sur les maturités longues a provoqué des ventes de BTPs et Bonos d’intervenants (principalement des gestions européennes) cherchant à diminuer leur exposition en sensibilité. Ces stratégies constituent une réponse logique à l’extension des maturités des émissions périphériques sur depuis le début de l’année. Cette volatilité a fait le jeu des hedge funds alternativement à l’achat et à la vente sur le contrat italien dans des volumes significatifs (>100k lots par jour). Dans ce contexte, le spread italien à 10 ans s’est écarté de 87pdb au plus bas le 12 mars à 110pdb environ aujourd’hui.
Sur les pays core, la Belgique a augmenté ses lignes 2041 et 2045 ce lundi pour 425mn € et 882mn € à 0,94% et 1,05% respectivement. Il s’agit des premières émissions core sur ces maturités depuis le lancement du programme de la BCE. Contrairement à la volatilité qui avait suivi la syndication de BTP 2032, le spread belge n’a augmenté que de 2pdb à 43pdb.
En termes de stratégies, nous maintenons nos expositions favorables globalement aux dettes périphériques en étant plus sélectifs sur les marchés core du fait du niveau des spreads.
Les spreads de crédit sous pression
Le marché du crédit reste sous pression. L’engorgement du marché primaire lié aux emprunts d’entreprises américaines pose un réel problème aux banques européennes peu enclines à animer le marché secondaire. Les spreads sont donc orientés en hausse. Le high yield est également vendu avec un écartement des primes à 363pdb contre la courbe allemande (Barclays). En revanche, les spreads sur les covered bonds (36pdb) et agences (40pdb) bénéficient du soutien de la BCE. Le total d’achats sur les obligations sécurisées ressort à 60mds €, soit 3,05mds € la semaine passée. Concernant les ABS, le total dépasse désormais les 4mds €.