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La liquidité n’a pas sa place dans notre sélection de facteurs

Plusieurs études académiques suggèrent que les titres illiquides devraient surperformer les valeurs liquides pour compenser le risque plus élevé. Pourtant, les preuves démontrant l’existence d’un effet de liquidité persistant pour les actions sont faibles. C’est pourquoi nous n’incluons pas la liquidité parmi nos facteurs pertinents dans le cadre de nos stratégies quantitatives actions

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La liquidité peut être définie comme la facilité d’exécution d’une transaction sans générer de frais excessifs. Lors de l’exécution d’une transaction, les investisseurs paient explicitement pour l’écart existant entre cours acheteur et cours vendeur (bid-ask spread), et implicitement pour toute fluctuation de cours défavorable due au retrait de liquidité sur le marché. Quoi qu’il en soit, plus un titre est illiquide, plus il est difficile et onéreux de le négocier, ce qui rend les titres illiquides moins attractifs par rapport aux ceux qui sont liquides.

Par conséquent, les titres illiquides devraient justifier une prime pour leur détention et inversement, les valeurs liquides devraient se négocier avec une décote. Ce raisonnement garantit l’existence d’une prime factorielle de liquidité dans la performance des titres et certaines études académiques prétendent en effet observer une telle prime dans leurs données.

Néanmoins, contrairement à d’autres facteurs fondés, la liquidité n’a jamais fait l’objet de beaucoup d’attention de la part des investisseurs, du moins sur les marchés actions.

Cela pourrait s’expliquer par le fait que les stratégies d’investissement basées sur le facteur liquidité sont difficiles à mettre en œuvre dans la pratique. D’autres facteurs fondés peuvent être exploités dans des portefeuilles très diversifiés jugés investissables d’un point de vue des investisseurs institutionnels. Néanmoins, ces investisseurs sont souvent confrontés à des contraintes de liquidité dans leurs décisions d’allocation. Ceci rend par conséquent une stratégie actions qui investit de manière explicite dans des titres illiquides moins attractive.

Mais cela pourrait également s’expliquer par le fait que les preuves de l’existence d’une prime de liquidité ne sont pas très solides.

S’il ne fait aucun doute que la liquidité est un élément important dans la construction de portefeuille, il n’est pas certain que les titres génèrent des performances supérieures simplement parce qu’ils sont illiquides.

En d’autres termes : les investisseurs en actions sont-ils récompensés pour la prise de risque d’illiquidité supplémentaire ?

La liquidité comme catalyseur et non comme facteur

Au cours des dernières décennies, plusieurs études académiques [1] ont présenté des preuves mettant en évidence un lien entre la liquidité et la performance des titres. La validité de ces résultats a cependant été remise en question. En particulier, diverses études [2] ont montré que l’effet de liquidité n’est pas solide sur différentes périodes de temps, et que quand il est constaté, et ce qui n’est pas toujours le cas, ce n’est qu’au cours de la période étudiée.

Par ailleurs, l’effet de liquidité est en grande partie conditionné par les micro-capitalisations, qui représentent environ 3 % de la capitalisation boursière totale du marché actions américain mais qui constituent 60 % du nombre total des actions. Lorsque l’on prend en compte ces éléments, les preuves démontrant l’existence d’un facteur liquidité bien rémunéré ne peuvent tout simplement pas être trouvées.

La liquidité interagit avec d’autres facteurs

Néanmoins, si l’existence d’un facteur liquidité à part entière est discutable, des interactions entre la liquidité et d’autres facteurs fondés existent bel et bien. Le lien entre la taille et la liquidité en est un bon exemple, les actions de petites entreprises ayant tendance à être moins liquides. De manière plus générale, il est logique que certains facteurs soient plus forts au sein des titres illiquides, puisque les segments illiquides du marché sont moins efficaces pour déterminer la juste valeur des actifs.

Les actions illiquides des petites entreprises peuvent par conséquent être considérées comme un catalyseur pour d’autres primes factorielles, plutôt que comme une source de performance indépendante.

Pour autant qu’il y ait des effets d’interaction entre des facteurs fondés et la liquidité au niveau du titre, un gérant actif a pour mission d’identifier et de modéliser ces effets dans les phases de sélection des titres et de construction du portefeuille. Étant donné que ces actions tendent, par définition, à être plus difficiles et plus onéreuses à négocier, une mise en œuvre intelligente du portefeuille peut de ce fait ajouter une valeur considérable pour les investisseurs.

La liquidité est essentielle dans la construction du portefeuille

La liquidité est un élément crucial à prendre en compte lorsqu’il s’agit de traduire des stratégies d’investissement théoriques dans des portefeuilles live. Pour reprendre les propos d’André Perold de l’Harvard Business School : « Il y a des différences fondamentales entre effectuer des transactions sur papier et effectuer des transactions sur les marchés réels ». Cet écart est plus connu sous le nom d’« implementation shortfall » (le coût total lié à la transition). Lors de la construction de portefeuilles-titres, les frais de transaction, qui sont directement liés au niveau de liquidité d’un titre, font diminuer l’alpha prévu.

Si les alphas prévus sont conditionnés par l’exposition à des primes de facteurs avérées et que la liquidité ne puisse pas être considérée comme un facteur d’alpha à part entière, c’est néanmoins un facteur déterminant des frais de transaction, et par conséquent des performances nettes. C’est pourquoi un processus de construction de portefeuille sophistiqué et une mise en œuvre intelligente peuvent ajouter beaucoup de valeur au processus d’investissement.

David Blitz Mars 2018

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Notes

[1] Voir par exemple : Y. Amihud et H. Mendelson, ‘Asset pricing and the bid-ask spread’, Journal of Financial Economics, décembre 1986 ; V. Datara, Y. Naikb et R. Radcliffec, ‘Liquidity and stock returns : An alternative test’, Journal of Financial Markets, août 1998 ; T. Chordia, A. Subrahmanyam et V. Anshuman, ‘Trading activity and expected stock returns’, Journal of Financial Economics, janvier 2001 ; V. Acharya et L. Pedersen, ‘Asset pricing with liquidity risk’, Journal of Financial Economics, août 2005 ; L. Pastor et R. Stambaugh, Liquidity Risk and Expected Stock Returns, Journal of Political Economy, juin 2003.

[2] Voir par exemple : J. Drienko, T. Smith et A. von Reibnitz, ‘A Review of the Return–Illiquidity Relationship’, Critical Finance Review, à paraître en octobre 2018 ; K. Hou, C. Xue, and L. Zhang, ‘Replicating Anomalies’, NBER, document de travail, 2017 ; H. Li, R. Novy-Marx et M. Velikov, ‘Liquidity risk and asset pricing’, 2017.

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