Au début du mois d’octobre, le gouvernement mexicain a réussi l’exploit de placer 1 milliard de dollars d’obligation d’échéance 100 ans, ce qui en fait le 1er état d’Amérique latine à émettre un « Century bond » et le second de l’histoire à lever plus de 500 millions de dollars pour cette maturité.
La deuxième plus grande économie d’Amérique latine a profité de la demande des investisseurs pour des placements peu risqués mais à haut rendement dans un contexte de taux d’intérêt historiquement bas en Europe et aux États-Unis.
Le taux servi aux investisseurs a été de 6,1%. Deutsche Bank et Goldman Sachs ont assuré le montage de l’opération.
Richard McNeil, directeur des marchés de capitaux pour l’Amérique latine chez Goldman, a déclaré que d’autres « Century Bonds » étaient tout à fait possible. « L’appétit des investisseurs pour les investissements en Amérique latine est très fort » explique t-il.
Tout le monde ne semble pas convaincu par cet emballement. « Je ne vois pas l’intérêt qu’auraient des investisseurs à se positionner sur des obligations à 50-100 ans. Cela pourrait peut être créer un marché, mais je suis sceptique, compte tenu de l’illiquidité, il y a de meilleures utilisations du cash pour les investisseurs » expliquait Pierre-Yves Bareau, responsable mondial de la dette des marchés émergents chez JP Morgan Asset Management, au Financial Times. Pas sûr que son avis eût été identique si JP Morgan figurait parmi les arrangeurs de cette obligation, réplique un spécialiste obligataire de Goldman. « La majorité des obligations a été vendue à des investisseurs institutionnels américains, avec une forte demande en provenance des compagnies d’assurance, des utilisateurs finaux, qui optimisent ainsi la couverture de leur passif à long terme et porteront l’investissement jusqu’à maturité » analyse -t-il.
Pour l’émission à 50 ans de Goldman Sachs, ce n’est pas la cible institutionnelle qui était visée mais le grand public ;
Goldman Sachs, qui a initialement déclaré qu’elle comptait vendre 250 millions de dollars de dette à 50 ans, a finalement émis pour 1,3 milliard de dollars. La banque a bénéficié de l’appétit des investisseurs privés pour cette obligation procurant 6,125% - le taux le plus bas de la fourchette initiale - de rendement annuel et découpée en petits lots de 25 de dollars.
Selon certains investisseurs, Goldman aurait réussi à obtenir le taux le plus avantageux pour lui en ciblant un public moins averti à l’évaluation des options de rappel à partir de 5 ans que possède la banque sur le titre.
In fine, ces obligations contribuent à diversifier la clientèle d’investisseurs de Goldman et à obtenir un financement à long terme à bas coût au moment où de nombreux intervenants - et notamment Bill Gross- s’inquiètent des effets de la nouvelle série d’achats d’actifs annoncée par la réserve fédérale.
Dans la lettre mensuelle sur les perspectives d’investissement de PIMCO publiée ce mercredi, Bill Gross compare la dette publique des Etats-Unis à une escroquerie de type schéma de Ponzi et son refinancement par le biais du « Quantitative Easing » à une gigantesque fraude pyramidale. S’il concède que les Etats-Unis ont réussi à rembourser leur dette nationale, notamment celle liée à la Deuxième guerre mondiale, il estime qu’ils ont tort de s’appuyer aujourd’hui sur le postulat que tant qu’on peut trouver de nouveaux créanciers pour rembourser les emprunts précédents, la spirale de l’endettement peut se perpétuer indéfiniment.
Bill Gross estime que la capacité de la Fed à faire repartir la croissance est sérieusement mise en doute. Selon lui, l’éclatement de la bulle obligataire est proche : Il n’est pour le moment pas entendu.
La dernière vente aux enchères sur les Treasury Inflation Protected Securities (TIPS) - la dette du Trésor US protégée contre l’inflation - a été un véritable succès.
L’émission, qui arrive à échéance le 15 avril 2015, est ressortie à un taux annuel de 0,5% avec un prix d’achat fixé à 105,5 pour un remboursement au pair à maturité indexé sur l’inflation. Le rendement réel de l’opération est de -0,55%.
La demande totale des investisseurs pour ces TIPS a approché les 29 milliards de dollars. Seulement 10 milliards ont été alloués, en majorité à des investisseurs institutionnels de long terme.
Une question reste posée, pourquoi se protéger de l’inflation avec des obligations à taux réels négatifs alors que l’or, les commodities, voire l’immobilier des pays émergents, permettent aussi une couverture à cette problématique ?