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Les marchés du carbone et l’accord post-2020

Depuis une décennie, les marchés du carbone ont largement attiré l’attention sur les mesures à prendre pour lutter contre le changement climatique. Néanmoins, ils se trouvent actuellement dans une situation de transition...

Depuis une décennie, les marchés du carbone ont largement attiré l’attention sur les mesures à prendre pour lutter contre le changement climatique. Néanmoins, ils se trouvent actuellement dans une situation de transition dû notamment : 1/ à une crise de confiance résultant du faible prix du CO2 (EUA et CER) ; 2/ au changement de l’architecture du protocole de Kyoto à une architecture qui devrait être plus décentralisée ; 3/ et à ’un débat croissant sur la prévention du risque de fuites de carbone via des mesures telles que l’allocation gratuite ou l’ajustement carbone aux frontières discuté actuellement en Californie.

En discutant de l’impact du changement de l’architecture du futur accord climatique mondial [1], deux questions se posent : 1/ Quel serait le rôle des marchés du carbone dans cet accord en 2015 ; 2/ Les marchés du carbone doivent-ils faire l’objet d’une disposition dans l’accord post-2020 ?

La réponse à la première question est que les marchés du carbone peuvent être considérés uniquement comme un outil de découverte du prix du CO2.

Une bonne découverte du prix du CO2 conduira à une répartition rationnelle du capital et aidera à diriger les flux financiers vers les efforts de décarbonisation. Il s’agit là de l’hypothèse implicite que les marchés du carbone seront utilisés pour le respect des objectifs pris en vertu de cet accord international post 2020, indépendamment de sa nature. Ce prix du CO2 est essentiel pour réduire les coûts de réduction, pour favoriser un niveau accru d’ambition et pour mobiliser le financement privé. Le financement public restera disponible, mais il est évident qu’il devra avoir un effet levier sur les capitaux privés. La discussion sur le Fonds Vert pour le Climat, aussi bien que celle au sein du Comité permanent des finances dans le processus de la CCNUCC, ne laisse aucun doute à ce sujet.

Pour ce faire, une bonne découverte des prix nécessite d’une part un bon fonctionnement des marchés, qui soient liquides et transparents, et d’autre part la reconnaissance de leur nature réglementaire, incluant la nécessité de prévoir des mesures de correction de marché par le régulateur. Néanmoins, ces marchés du CO2 ne peuvent être considérés comme la solution miracle. D’autres politiques complémentaires seront nécessaires, notamment pour faire émerger un signal de long terme afin de stimuler le développement de nouvelles technologies et favoriser les investissements de long terme.

La réponse à la deuxième question est plus complexe et dépend en grande partie d’une part de la nature et l’architecture de l’accord post-2020 et d’autre part de l’évolution des marchés du carbone.

Tout d’abord, l’évolution des marchés du carbone pourrait emprunter plusieurs voies qui seraient 1/ un « super protocole de Kyoto », scénario peu probable, qui verrait un régulateur international décider de l’objectif de réduction pour chaque entité ; 2/ des marchés du CO2 liés à la CCNUCC, avec des approches infranationales/ nationales/régionales, raccordés à l’épine dorsale d’un marché international, 3/ un réseau mondial de marchés du CO2 composé d’unités nationales différentes (semblables à des devises), qui auraient un taux de change pour la conformité mondiale et nationale. Dans ce cas, il n’y aurait aucun effort pour lier ces marchés, effort dont la complexité et les conséquences pourraient être sous-estimées. Ensuite, ces scénarios devront être couplés avec l’architecture du nouvel accord qui pourrait suivre 4 voies : 1/ un régime dans lequel toutes les unités carbones internationales de conformité pourraient être utilisées sans aucune norme mondiale, 2/ un régime décentralisé qui reposerait sur quelques normes minimales indicatives, 3/ un régime de normes mondiales devant être respectées mais sans approbation requise pour les unités de conformité, 4/ un régime de normes mondiales définies par la Conférence des Parties et devant être respectées.

Le passé devrait fournir aussi des enseignements pour l’avenir. Le protocole de Kyoto se fondait, après tout, sur quelques dispositions très simples : 1/ la comptabilisation des transferts internationaux (articles 3.10 à 3.12), 2/ l’échange des unités distribuées par les Nations Unies (UQA, article 17), 3/ la création de mécanismes de crédit, MDP et MOC, par la CCNUCC (articles 6 et 12).

Nous pouvons en conclure que l’accord de 2015 devra contenir des dispositions permettant aux marchés du carbone de se maintenir et de se développer, mais que ces dispositions n’auront pas besoin d’être très détaillées dans l’accord de Paris.

Andrei Marcu Juillet 2014

Notes

[1] Marcu A., « The Role of Market Mechanisms in a Post-2020 Climate Change Agreement », CEPS Special Report, n° 87, mai 2014.

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