Next-finance : Certaines sociétés de gestion refusent encore de faire usage de l’analyse quantitative dans leur processus d’investissement, parfois avec un succès apparent. Comment est-il encore possible de faire de l’investissement en se fondant uniquement sur des analyses financières sans tenir compte des facteurs communs explicatifs d’une partie des variations et covariations des actifs entre eux ?
Thierry Roncalli : Je pense que l’on sous-estime la part de l’analyse quantitative dans la gestion active discrétionnaire et fondamentale. Les processus d’investissement basés uniquement sur un style de gestion de conviction pure sont rares. D’autre part, on note que les gestions qui n’ont aucun processus quantitatif rigoureux au niveau de la construction de portefeuille intéressent très peu les investisseurs institutionnels. Un processus d’investissement est généralement appréhendé comme un séquencement de prises de décision. L’investisseur institutionnel a besoin de mesurer la pertinence et la valeur ajoutée des différentes étapes du processus afin d’évaluer de façon qualitative et quantitative les risques de la stratégie (risques de volatilité, risque de corrélation, risque de tracking error, risque de perte maximale, etc.). Une gestion sans aucune composante quantitative est incompatible avec les standards de due diligence imposés par les investisseurs institutionnels.
Une gestion sans aucune composante quantitative est incompatible avec les standards de due diligence imposés par les investisseurs institutionnels.Thierry Roncalli, Responsable de la Recherche et Développement, Lyxor Asset Management
La recherche quantitative des équipes de gestion semble tourner autour des améliorations à apporter au modèle de Markowitz. Quels sont les sujets majeurs sur lesquels travaillent les équipes de recherche de Lyxor Asset Management ? Quel impact pour vos clients, les investisseurs institutionnels ?
Lyxor a acquis une réputation très forte auprès des professionnels et des académiques sur les sujets de construction de portefeuille. Dès 2007, l’équipe de Recherche de Lyxor est pionnière dans les méthodes de risk parity avec notamment la création de la fameuse stratégie ERC (Equal Risk Contribution). Encore aujourd’hui, l’équipe de Recherche de Lyxor consacre une grosse partie de ses efforts à améliorer et à étendre les méthodes de risk parity tant d’un point de vue théorique que d’un point de vue pratique. L’année 2013 a été surtout marquée par l’extension de la méthode risk parity avec des modèles factoriels de risque, la prise en compte des vues des gérants et des tendances dans les méthodes de risk budgeting et la construction de nouveaux modèles de smart beta à la fois sur les actions et les obligations. A ce titre, Lyxor Asset Management et EDHEC-Risk ont lancé cette année une chaire de recherche pour construire des méthodes de risk parity de nouvelle génération qui prennent en compte les changements de régime économique et la dynamique des primes de risque.
L’équipe de recherche de Lyxor a lancé un programme de recherche sur la régularisation du modèle de Markowitz et l’utilisation des techniques de machine learning et de big data pour améliorer les méthodes d’optimisation de portefeuille.Thierry Roncalli, Responsable de la Recherche et Développement, Lyxor Asset Management
Parallèlement à cette recherche sur le risk parity et le smart beta, l’équipe de recherche de Lyxor a lancé un programme de recherche sur la régularisation du modèle de Markowitz et l’utilisation des techniques de machine learning et de big data pour améliorer les méthodes d’optimisation de portefeuille. Cela a d’ailleurs donné lieu à la publication d’un white paper en juillet 2013. Ces différentes recherches, tant sur le risk parity, sur le smart beta que sur l’optimisation de portefeuille ont permis d’améliorer les programmes de gestion existants et d’étendre l’offre produits de Lyxor.
D’autre part, l’équipe de recherche de Lyxor travaille aussi sur des sujets et des questions qui émanent directement des investisseurs institutionnels. C’est ainsi qu’elle a proposé une mesure d’efficience pour comparer la performance des ETFs, qu’elle a développé une méthode d’allocation stratégique basée sur les facteurs de risques économiques. Aujourd’hui, l’équipe de recherche travaille sur la liquidité des ETFs et la place des hedge funds dans les allocations de long-terme des fonds de pensions.
Quels sont les critères qui motivent la mise en avant d’un thème à la place d’un autre ? Les résultats sont-ils immédiatement exploitables par les équipes de gestion ? Votre rôle est-il parfaitement compris par vos collègues de la société de gestion (Gérants, Sales, etc..) et par les investisseurs ?
C’est tout d’abord la proximité des équipes de gestion et de recherche avec les investisseurs institutionnels qui explique le développement de certains thèmes de recherche. Par exemple, le développement du modèle d’allocation stratégique basé sur des facteurs de risque est une demande explicite de certains investisseurs sophistiqués qui veulent connaitre la sensibilité de leur allocation de long-terme par rapport à l’inflation et à la croissance économique. De même, la mesure d’efficience des ETFs a été créée à la demande de nos clients afin de leur fournir un système de sélection rigoureux et une mesure de performance synthétique.
Le développement du modèle d’allocation stratégique basé sur des facteurs de risque est une demande explicite de certains investisseurs sophistiqués qui veulent connaitre la sensibilité de leur allocation de long-terme par rapport à l’inflation et à la croissance économique.Thierry Roncalli, Responsable de la Recherche et Développement, Lyxor Asset Management
Dans le cas des méthodes d’allocation, l’équipe de gestion s’approprie la technologie, teste celle-ci de façon intensive et propose généralement des améliorations pour notamment calibrer les paramètres du modèle. On est beaucoup plus dans un mode d’allers-retours que dans un mode séquentiel. D’ailleurs, chez Lyxor, il y a une interaction très forte entre l’équipe de recherche et l’équipe de gestion, puisque celles-ci sont regroupées dans le même département. C’est pourquoi il est généralement difficile d’attribuer la paternité d’une méthode d’allocation ou d’une stratégie de gestion car c’est avant tout le fruit d’un travail collaboratif.
Lyxor a une culture très forte dans le domaine de la recherche, de l’innovation et de la gestion des risques. Ceci explique la proximité entre les équipes de vente, de gestion et de recherche afin que l’investisseur comprenne parfaitement la valeur ajoutée des nos solutions. D’ailleurs le contact avec les investisseurs et notamment les investisseurs institutionnels sophistiqués est primordial pour améliorer les programmes de gestion et de recherche existants. Chez Lyxor, la recherche n’est pas considérée comme une tour d’ivoire déconnectée des problématiques des investisseurs. Elle est complètement au service de la gestion et apporte de réelles solutions pour nos clients institutionnels. Ceux-ci l’ont parfaitement compris, ce qui explique que la recherche quantitative de Lyxor jouit d’une crédibilité que peu d’asset managers ont sur le sujet de l’allocation de portefeuille.