Si le marché des actions britanniques était boudé au début de l’année 2020, il l’est encore plus actuellement. Jusqu’à l’arrivée des trois vaccins, qui a déclenché une vague d’exubérance sur les marchés en fin d’année, les actions britanniques avaient perdu environ 20%. Seuls les marchés actions de Russie et du Brésil affichent une moins bonne performance depuis le début de l’année. Les responsables d’allocations d’actifs restent donc réticents à envisager les actions britanniques [1], qui sont encore moins chères qu’il y a un an.
Lors de précédents krachs, les actions qui avaient permis aux marchés d’atteindre leur sommet sont celles qui ont le plus souffert. Cela devrait donc logiquement placer le secteur de la technologie aux Etats-Unis ou les actions chinoises à l’arrière du peloton cette année alors que ces deux classes brillent de tous leurs feux sur les marchés mondiaux en 2020. Parallèlement, les sociétés internationales cotées au Royaume-Uni affichent une double décote par rapport à une cotation en Europe ou aux États-Unis. La décote moyenne s’élève ainsi à 40% par rapport au MSCI World [2] !
Un marché bipolaire
Les marchés actions sont devenus bipolaires : les cinq principales valeurs technologiques américaines, Facebook, Apple, Alphabet, Amazon et Microsoft, sont à l’origine de la majeure partie de la solide performance du marché actions des Etats-Unis. Nous pouvons cependant nous attendre à des retournements. Rishi Sunak, chancelier de l’Echiquier britannique, a affirmé dans l’examen des dépenses de novembre que la contraction de 11,3% du PIB en 2020 est la plus importante que le pays ait connue en 300 ans [3]. Même si une reprise de l’économie est prévue en 2021 et 2022, le chemin s’annonce chaotique.
La rapidité avec laquelle le marché actions britannique s’est retourné après l’annonce de Pfizer et BioNTech, mi-novembre, sur les données prometteuses de leur vaccin contre le Covid-19 est impressionnante. Plusieurs mois de surperformance des actions de croissance ont été effacés en une seule séance, ce qui montre que de nombreux investisseurs ont des positions similaires. La recrudescence des investisseurs quantitatifs, des ETF et de l’investissement factoriel a déséquilibré le marché et illustre parfaitement le niveau élevé de consensus.
Nous continuons de croire fermement dans le Royaume-Uni, mais les tendances se prolongent souvent plus longtemps que prévu. Cela engendre l’opportunité que nous entrevoyons aujourd’hui, du fait de l’amplification de l’impact au moment où le basculement se produit enfin.
Prendre garde à la fenêtre qui se ferme
Toutefois, la fenêtre pour le déblocage de cette valeur potentielle est en train de se refermer. Si le Covid-19 et le Brexit ont miné les opinions relatives à l’économie britannique, le marché actions n’aura pas besoin d’une reprise spectaculaire pour afficher de meilleures performances.
D’ici à la fin de l’année 2021, l’investissement devrait repartir à la hausse et les entreprises se rétablir. Malheureusement, les faillites seront plus nombreuses qu’après la crise financière mondiale, car les banques ont aujourd’hui davantage de capital et peuvent se permettre d’exiger le remboursement de leurs créances douteuses. Le chômage pourrait retrouver des niveaux comparables aux années 1980, lorsque trois millions de personnes étaient sans emploi.
Le marché des actions britanniques sort néanmoins d’une période de faible valorisation. Dès lors, si les fusions et acquisitions restent élevées et s’accélèrent, c’est en raison d’une forte tendance à faire abstraction du bruit à court terme et à se concentrer sur les valorisations, pas de la part des opérateurs de marché, mais plutôt des acteurs des marchés du capital investissement et des entreprises américaines. Ces derniers savent que le temps est compté. Les premiers restent quant à eux trop timorés pour exploiter cet arbitrage de valorisations, mais attendre encore longtemps d’avoir des certitudes, c’est risquer de voir s’échapper l’opportunité.
Les dividendes sont de retour
Les dividendes jouent un rôle essentiel au niveau des retraites, de l’épargne et des revenus de la population britannique. Les baisses de dividendes sur le marché britannique ont été sévères et n’ont épargné personne. Ce type de processus se produit à la fin de chaque cycle, mais avec le Covid-19, il s’est concentré sur trois semaines à peine. Depuis, 60 sociétés ont déjà réinstauré des dividendes [4]. D’autres suivront. Mais pour l’avenir, nous nous attendons à des politiques plus prudentes et à une meilleure couverture, et même dans le pire des scénarios, le marché britannique devrait offrir une belle prime de rendement par rapport aux obligations d’ici à l’an prochain. Pour l’heure, cependant, les bilans et la liquidité sont primordiaux.
Les meilleures opportunités de la décennie
Alors que la double décote britannique commence à s’amenuiser, compte tenu de la plus grande clarté offerte sur la question du Brexit et des avancées sur le plan des vaccins, 2021 et 2022 pourraient être de grandes années pour le marché actions du Royaume-Uni. Même des sociétés de croissance de qualité comme le Britannique Unilever affichent des cours bien inférieurs à ceux de leurs concurrents à l’échelle mondiale. A nos yeux, ce ne sont pas seulement un ou deux secteurs du marché britannique qui sont abordables, mais bien son intégralité !
Le meilleur moment pour investir est lorsque cela semble inconfortable. Bien évidemment, le Royaume-Uni est encore boudé, mais les trois quarts des bénéfices des sociétés britanniques proviennent de l’international, c’est donc le PIB mondial que devrait doper le marché domestique.
En tant que gérants actifs, celui-ci nous enthousiasme. L’univers des titres en difficulté offre selon nous des opportunités parmi les meilleures de la décennie. Alors que les investissements quantitatifs et factoriels se focalisent sur des poches d’actions (basées sur des données chiffrées), la gestion active met logiquement en relation la valeur offerte par une action et son cours. Nous nous attendons à un redressement du marché britannique et de ses sociétés peu appréciées.