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Hausse récente de la volatilité et comportement du marché du crédit corporate : Mise en perspective de la hausse récente de la volatilité

Au cours des deux à trois dernières semaines, les marchés du crédit ont subi une correction. Selon nous, cette correction ne s’explique pas par les fondamentaux des entreprises, qui restent robustes...

Bien qu’une telle revalorisation puisse donner lieu à quelques inquiétudes à court terme, en tant qu’investisseurs « bottom-up », nous accueillons assez favorablement cette correction.

En effet, cet environnement de marché nous permet de bénéficier d’opportunités d’investissement sur des émissions offrant un taux plus attrayant, par des entreprises à même de rembourser le principal une fois leur dette arrivée à maturité. Le présent article analyse les raisons qui sous-tendent cette correction et détaille les données relatives aux fondamentaux de crédit et au risque de duration sous-jacents.

Le retour de la volatilité – une remontée en deux temps

Entre le 22 mai 2013 (discours de Ben Bernanke devant le Congrès américain) et le 6 juin 2013, les marchés high yield américains ont chuté de 2,45%. Cette performance a été marquée par une évolution en deux temps. Afin d’illustrer en détail les tenants et aboutissants de cette correction, nous avons retenu le marché high yield américain comme exemple (indice BofA ML U.S. high yield Cash Pay – J0A0). Cependant, il convient de noter que les mêmes tendances, certes moins prononcées, sont également présentes en Europe et au sein des marchés émergents.

La première phase de la correction a eu lieu entre le 22 mai et le 28 mai 2013, et a été marquée par une revalorisation des actifs, en réaction aux craintes entourant la possibilité d’un retrait par la Réserve Fédérale de sa politique de Quantitative Easing. Au cours de cette période, les marchés du crédit ont évolué conformément aux attentes, les segments de l’univers obligataire les plus sensibles à l’évolution des taux de rendement ayant enregistré une baisse plus forte que les segments sensibles au crédit. Ainsi, les bons du Trésor américains à 10 ans (indice BofA ML U.S. 10 Year Treasury – GA10) ont chuté de 1,61%, les obligations d’entreprises notéesinvestment grade (indice BofA ML U.S. Corporate Master – C0A0) de 0,91% et les obligations high yield américaines (indice BofA ML U.S. high yield Cash Pay – J0A0) de 0,44%. Au sein du segment high yield, les titres notés BB ont corrigé plus sévèrement que les titres notés CCC (Source : BofA ML).

Si les marchés high yield affichent une certaine sensibilité à court terme à l’évolution des taux de rendement des emprunts d’État, sur le moyen/long terme, la classe d’actifs fait généralement preuve de plus de résilience. Au cours des 20 dernières années, les bons du Trésor américains à 10 ans ont enregistré 32 trimestres de performance négative. Les obligations high yield américaines ont surperformé les bons du Trésor américains à 10 ans sur l’ensemble de ces périodes, à l’exception d’une. Le segment high yield a même généré une performance positive sur 85% de ces trimestres. De plus, au cours de ces mêmes années, la corrélation entre le marché high yield américain et les bons du Trésor à 10 ans est ressortie à -0,10. D’après nous, il existe quatre raisons qui expliquent cette performance relativement robuste à long terme : (1) les emprunts d’État contre-performent généralement dans un environnement économique robuste ou en voie d’amélioration, tandis que les spreads de crédit ont davantage tendance à se resserrer durant de telles périodes ; (2) le spread supplémentaire offert par le high yield par rapport aux emprunts d’État offre une certaine protection en cas de remontée des taux ; (3) la duration du marché high yield est relativement courte (actuellement inférieure à 4 ans) ; et (4) les investisseurs institutionnels sont contraints de conserver une exposition au marché obligataire. Aussi, durant des périodes de remontée des taux, ces investisseurs peuvent avoir intérêt à réduire leur exposition aux emprunts d’État et aux obligations investment grade et conserver, voire renforcer, leur allocation sur le high yield, dans la mesure où ce segment est plus à même d’absorber les hausses de taux d’intérêt.

La seconde phase de la correction du marché s’est déroulée entre le 29 mai et le 6 juin 2013. Cette période a été marquée davantage par une réévaluation globale des actifs risqués que par un focus sur les taux.

Le marché high yield américain a ainsi perdu 2,03%, tandis que le marché d’actions américaines (indice S&P 500) a chuté de 2,17% et le VIX (mesure de la volatilité du marché) est remonté de 14,83 à 16,63. En revanche, durant cette même période, les bons du Trésor américains à 10 ans ont généré une performance relativement étale.

Au cours de cette phase de la correction du marché, le segment high yield a eu un comportement très proche de celui observé en août 2011. Les investissements à court terme en monétaire, généralement réalisés par des investisseurs privés via des ETF, ont quitté la classe d’actifs. À cet égard, les deux principaux ETF high yield, JNK et HYG, ont subi d’importants rachats. Entre le 22 mai et le 6 juin 2013, l’ETF JNK a chuté de 2,90%, contre une baisse de 2,45% pour le marché high yield américain. La sous-performance de cet ETF par rapport au marché high yield s’explique par le fait que la correction ait été induite en partie par des facteurs techniques. JNK a subi environ 10% de rachats durant cette période, ramenant le nombre de parts de l’ETF à un niveau inégalé depuis début 2012. Cette évolution laisse penser qu’un volume significatif de flux spéculatifs est sorti du marché.

Si le retrait des investissements monétaires à court terme de la classe d’actifs a indéniablement eu des retombées mark-to-market, nous accueillons favorablement cette évolution qui a également eu pour effet de générer des opportunités d’investissement et de pousser vers la sortie des investisseurs qui ne maîtrisent pas cette classe d’actifs.

Les fondamentaux du marché

Selon nous, les fondamentaux des entreprises high yield restent robustes, dans la mesure où les niveaux de trésorerie et les ratios de couverture des intérêts sont toujours supérieurs à leur moyenne historique. Plusieurs entreprises ont placé des volumes significatifs sur le marché primaire afin de tirer profit des taux d’intérêt historiquement faibles et de garantir leur financement.

Ainsi, pour ces entreprises, le mur de la dette a été reporté à 2015 et au-delà. Les taux de défaut restent faibles et les perspectives plutôt positives. Nous anticipons un taux de défaut inférieur à 2% sur 2013 et 2014, contre une moyenne de long terme sur 25 ans de 4,0% (JP Morgan).

En synthèse, nous considérons que le risque de crédit reste très limité par rapport à la moyenne historique.

Valorisation

Les spreads du crédit high yield américain se sont élargis ces deux dernières semaines pour atteindre 505pb le 6 juin 2013, contre 421pb le 10 mai dernier, tandis que les taux de rendement ont fortement augmenté à 6,08%. Nous estimons que le segment high yield reste attrayant en termes relatifs, par rapport aux autres segments obligataires. Au 6 juin 2013, les obligations d’entreprises américaines notées investment grade généraient un rendement de 3,03% avec un « spread to worst » de 143pb, contre un rendement de 2,07% pour les bons du Trésor américains à 10 ans. Les obligations d’entreprises investment grade et les bons du Trésor américains sont tous deux exposés à un risque de duration significatif.

Compte tenu du risque de crédit relativement faible et des valorisations plus attrayantes, il convient de se demander si, aux niveaux actuels, les valorisations rémunèrent réellement les investisseurs pour le risque de duration

. Une approche possible pour tenter de répondre à cette question consiste à analyser les taux de défaut implicites. Les bons du Trésor à 5 ans offrent actuellement un rendement de 1%. Ce niveau traduit un taux de défaut implicite pour le marché high yield de 5,7% (c’est-à-dire qu’à un tel taux de défaut, les investisseurs n’opèrent plus de différenciation entre une position sur des bons du Trésor à 5 ans et des obligations high yield, toutes choses égales par ailleurs). Quelle serait l’évolution du taux de défaut implicite en cas de vive hausse des bons du Trésor à 5 ans ? À 2% de rendement sur les bons du Trésor, le taux de défaut implicite passe à 4,2%, tandis qu’à un niveau de rendement de 3%, le taux de défaut implicite tombe à 2,7%. Même dans l’éventualité d’une hausse aussi marquée des niveaux de rendement, un taux de défaut de 2,7% reste supérieur aux anticipations de 2% de notre équipe et de JP Morgan pour le marché high yield. En d’autres termes, aux niveaux actuels, le spread semble largement rémunérer les investisseurs, tant pour le risque de crédit que pour le risque de duration.

Positionnement du portefeuille

La revalorisation de la classe d’actifs procède essentiellement de la duration et des facteurs techniques du marché et non de l’émergence d’événements de crédit.

Nous restons sous-pondérés sur le segment de l’univers high yield le plus sensible à la duration. De plus, nous suivons de près les obligations les plus largement détenues par les ETF et cherchons à rester sous-pondérés sur ces titres, qui tendent à afficher une volatilité élevée du fait de l’évolution des flux d’investissements dans les ETF.

Nous sommes également investis et continuons de rechercher des crédits de haute qualité offrant des coupons élevés. Conformément à notre philosophie d’investissement, nous n’avons pas l’intention de sacrifier la qualité au profit du rendement. Le focus du fonds sur le crédit high yield de haute qualité vise à protéger le portefeuille durant des périodes de baisse des marchés.

Conclusion

Bien qu’il soit impossible d’identifier le moment idéal pour réaliser un investissement, nous pensons que la correction actuelle du marché offre un point d’entrée intéressant pour les investisseurs obligataires, compte tenu des fondamentaux sous-jacents et de la résilience traditionnelle de la classe d’actifs face aux remontées de taux. Au cours de la semaine dernière, nous avons noté le retour des investisseurs de long terme, ce qui a permis de soutenir le marché. Il existe deux catégories de corrections : celles qui procèdent de fondamentaux de crédit médiocres et celles induites par des facteurs techniques. Si les investisseurs s’exposent très clairement à un risque de perte, en l’absence d’analyse crédit robuste, pour tout investissement réalisé au cours d’une correction relevant de la première catégorie, il semble en revanche que les investissements réalisés durant une correction induite par des facteurs techniques ont généralement tendance à bien performer.

Nous restons centrés sur notre approche et ciblons les entreprises à même de verser les intérêts et de rembourser le principal, tout en contrôlant la duration du portefeuille.

Nous cherchons à générer un couple rendement/risque attrayant au profit des investisseurs, tout en les protégeant contre les risques extrêmes, une détérioration de l’économie et les retombées liées au retrait des mesures plus qu’audacieuses d’assouplissement quantitatif.

Eric Pictet Juin 2013

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