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Investisseurs privés : une source de financement alternative pour les promoteurs

Selon Wragge [1] ,la crise bancaire et le renforcement des exigences de fonds propres limitent la capacité des établissements de crédit à financer les projets immobiliers en blanc. C’est le moment pour des investisseurs personnes physiques de pallier à cette carence, soit en entrant directement dans le tour de table d’opérations, soit en souscrivant à une émission de dette mezzanine.

Les opportunités pour se positionner sur l’immobilier se diversifient pour les investisseurs privés. Alors que les placements traditionnels (SCPI, investissements locatifs défiscalisés…) les amènent habituellement à porter le foncier dans le temps et à en capter le rendement, ils ont désormais la possibilité de participer plus en amont aux programmes de construction ou de réhabilitation immobilière, et donc d’intercepter une plus large part de la valeur générée par ces projets.

Cette possibilité n’est, certes, pas nouvelle. Au début des années 2000, déjà, quelques promoteurs avaient cherché à impliquer des investisseurs privés à leurs côtés pour financer certaines opérations. Mais la relative facilité d’accès au levier bancaire a vite coupé court à ces montages confidentiels, qui ont, de fait, disparu dans les années 2005 et 2006. Depuis quelques mois, le recours aux investisseurs privés est de nouveau d’actualité, à la demande des promoteurs eux-mêmes. Au cœur de ce retour en grâce, la crise bancaire et le renforcement des exigences de fonds propres (Bâle 3) limitent la capacité des établissements de crédit à financer les projets immobiliers et amènent les promoteurs à rechercher des sources de financement alternatives. De leur côté, des particuliers fortunés cherchent à accéder à des typologies d’investissements moins corrélées au marché et plus rémunératrices que les véhicules de portage foncier traditionnels, au moment où les prix immobiliers pourraient commencer à se retourner.

En réalité, les investisseurs privés interviennent au stade du montage où le levier bancaire fait défaut, c’est-à-dire après l’analyse de faisabilité (obtention du permis de construire, levée du risque de préemption…), mais avant la commercialisation des programmes. En clair, ils permettent de cofinancer les opérations en blanc, pour lesquelles ils partagent généralement le seul risque de commercialité. Ils interviennent donc sur une courte période (jusqu’à près de deux ans) sur la foi d’une analyse purement économique de la demande du marché, le risque technique étant assumé en amont par le promoteur seul. Ce type de schéma peut également se rencontrer pour le financement d’opérations « marchands de biens ».

Dans la pratique, les investisseurs privés peuvent intervenir de plusieurs façons, qui s’inspirent en partie des méthodes du capital-investissement.

Co-investissement en direct via des SCCV ou des SEP

Les personnes physiques peuvent intervenir dans les opérations en investissant directement en capital aux côtés des promoteurs dans des SCCV (sociétés civiles de construction vente), qui ont pour unique objet la construction et la commercialisation d’un programme résidentiel. Le promoteur partage ainsi la marge générée [2] par ledit programme en proportion de l’apport de son(ses) partenaires(s). Un exemple : un promoteur achète un terrain en vue d’y construire un programme résidentiel de 60 appartements pour 20 millions d’euros. Il a obtenu son permis de construire et levé les risques techniques et administratifs. Deux millions d’euros sont nécessaires pour lancer le projet, mais il n’est qu’en mesure d’investir un million d’euros. Il fait donc entrer des partenaires privés à hauteur d’un million d’euros supplémentaire au sein d’une SCCV créée à cet effet, afin de lancer le programme avant sa commercialisation en VEFA. Celui-ci ressortira ensuite de la SCCV une fois le programme vendu et se rémunérera sur la marge générée en proportion de sa quote-part des actions de la structure.
Autre possibilité, l’investisseur peut s’associer directement avec un marchand de biens au sein d’une SEP (société en participation), qui est une forme de société dépourvue de personnalité morale ayant pour vocation de rassembler des personnes morales ou physiques pour réaliser un projet (par exemple une acquisition/réhabilitation en vue d’une revente à la découpe). Ici encore, l’investisseur recevra une partie de la marge.

Souscription à une émission de dette mezzanine

Plutôt que de faire entrer l’investisseur privé dans la SCCV et de partager avec lui la marge générée par le programme au prorata de sa participation, le promoteur peut choisir d’émettre une dette mezzanine adossée au projet, c’est-à-dire dont le remboursement est subordonné à celui de la dette senior. En échange du risque pris par l’investisseur, le promoteur sera généralement prêt à rémunérer ce dernier souvent au-delà de 10 %. C’est, pour ce dernier, nettement plus onéreux que le remboursement d’un prêt bancaire senior classique, mais tout de même plus attractif que le partage de la marge induit par une participation en capital de l’investisseur privé. Pour l’investisseur, le risque est alors limité à son apport.

Investissement indirect via des véhicules collectifs

Une autre solution consiste à donner les moyens au promoteur de financer ses programmes en renforçant ses fonds propres ou ses quasi-fonds propres. Certaines sociétés de capital-investissement permettent ainsi de se positionner sur des FCPR investis soit dans le capital d’opérateurs immobiliers (dans le cadre d’opérations de build-up ou de simples augmentations de capital), soit dans des dettes mezzanines émises par des promoteurs. Si certains acteurs historiques du capital-investissement disposent d’une expertise immobilière de longue date, un grand nombre étoffent, ces derniers temps, leurs équipes d’analyse immobilière, afin de capter les opportunités quand elles se présentent.
Si aucun régime fiscal dérogatoire n’est a priori applicable à ce type d’investissement, les activités de construction d’immeuble en vue de leur revente sont redevenues éligibles à la loi Tepa depuis la fin de l’année dernière (Bulletin officiel des impôts du 9 décembre 2011), ce qui permet aux particuliers d’investir dans des PME dédiées à ce type d’activité, tout en réduisant leur ISF de 50 % des sommes investies. Plusieurs PME et FCPR ISF de ce type sont d’ailleurs en cours d’instruction à l’AMF dans le cadre de la prochaine campagne.

Cette désintermédiation bancaire apparaît donc comme une opportunité pour les investisseurs privés avertis. Reste que cette fenêtre d’opportunité devrait se refermer tôt ou tard. Car quand ils remplacent les Banques dans le financement des opérations en blanc, les investisseurs privés demandent en retour des ressources importantes en matière d’accompagnement et exigent du promoteur un partage de la marge qui va bien au-delà des taux d’intérêt applicables par les banques. Autrement dit, trop chers, ils pourraient bien être évincés de ce marché dès que les banques refinanceront à nouveau les opérations en blanc.

Wragge Avril 2012

Notes

[1] Wragge & Co est un cabinet d’avocats international d’origine britannique. Créé en 1834 à Birmingham, le cabinet compte 124 associés et plus de 600 collaborateurs répartis dans 8 bureaux : Birmingham, Londres, Paris, Bruxelles, Munich, Abou Dhabi, Dubaï et Guanzhou

[2] Remarque importante : la contrepartie à l’accès à la marge bénéficiaire de l’opération est le prix du risque des investisseurs qui investissent via des outils juridiques ne limitant pas leur responsabilité à leurs apports.

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