Malgré la politique italienne et la médiocrité liée au climat des chiffres américains, la volatilité des marchés reste contenue. Le Bund à 10 ans évolue dans une fourchette étroite entre 1,65 et 1,70%. Les Treasuries s’échangent autour de 2,75% soit le niveau de taux moyen depuis un mois. L’aversion au risque émergent s’est temporairement résorbée et les actifs risqués ont repris le chemin de la hausse après la correction observée fin janvier. Le spread de l’indice émergent EMBI a rebaissé de 30pdb depuis ses sommets du 3 février à 337pdb au-dessus des Treasuries. Cependant, les reports d’investissement vers les dettes périphériques continuent. Les obligations espagnoles et italiennes à 10 ans se traitent désormais largement sous le seuil des 200pdb. La sous-performance du crédit vis-à-vis des émetteurs souverains en zone euro se poursuit, même si la performance totale s’affiche au delà de 1,5% depuis le 31 décembre. Sur le marché des changes, l’euro semble ignorer les menaces réitérées de taux de dépôt négatif en repassant la barre des 1,37$. La livre britannique poursuit son ascension retrouvant ses plus hauts depuis 2009 à 1,67$.
Vers une baisse du taux de dépôt ?
Les premières estimations du PIB du 4T13 ont été publiées la semaine passée en Zone Euro. De manière générale, les chiffres attestent d’une accélération de la croissance sur les trois derniers mois. La Belgique (+0,4%T), le Portugal (+0,5%T) ou encore les Pays-Bas (+0,7%T) constituent les bonnes surprises. A l’inverse, la croissance en France et en Italie affiche respectivement +0,3%T et +0,1%T. Au total, la Zone Euro a crû de 0,3%T (0,5%A) au dernier trimestre. Les détails sur la demande manquent à l’exception de la France dont les chiffres attestent d’une bonne tenue de la consommation privée (+0,5%T) et des dépenses publiques (+0,4%T) ainsi que d’une stabilisation de l’investissement productif après sept trimestres de contraction.
Paradoxalement, cette bouffée d’oxygène retarde tout geste de soutien monétaire de la part de la BCE. Les tensions sur les prix restent pourtant très réduites dans l’ensemble de l’union monétaire, l’inflation s’affichant encore sous 1%A en janvier. En outre, la BCE a désormais moins d’instruments à sa disposition. L’avis défavorable de la cour constitutionnelle allemande sur l’OMT (relayé par la BuBa) a sans doute rendu caduc ce moyen d’intervention et éloigné la possibilité de recourir à des achats d’actifs. En revanche, l’abaissement du taux de dépôt en territoire négatif fait partie de l’arsenal de la Banque Centrale malgré ses conséquences probablement néfastes au fonctionnement des marchés monétaires.
Une diminution du taux de dépôt dès le mois de mars, peut-être conjointe à une baisse du refi à 0,125%, semble gagner en probabilité.
Le caractère expérimental d’une telle mesure pourrait en réduire la portée d’autant que son effet sur l’euro serait limité compte tenu de la volatilité observée sur les devises émergentes.
Yellen prudente sur l’emploi
Aux Etats-Unis, Janet Yellen a débuté le 1er février son mandat en tant que Présidente de la Fed. Lors de son rapport semestriel devant le Congrès, elle est apparue prudente quant à la situation sur le marché du travail après des chiffres médiocres en décembre-janvier (<200k embauches au total). Malgré un taux de chômage revenu à 6,6%, la proportion anormalement élevée des chômeurs de plus de 6 mois et le temps partiel subi indiquent que le plein emploi est encore loin d’être atteint. Sans surprise, Janet Yellen a donc maintenu une discours très accommodant compatible avec la poursuite du tapering jusqu’en octobre prochain avant un éventuel premier relèvement des taux mi-2015. En revanche, la volatilité des marchés émergents ne constitue pas, à ce stade, un risque majeur sur la croissance américaine.
Biais légèrement baissier sur les taux
Les marchés de taux ont évolué dans une fourchette étroite depuis la correction induite par les tensions dans les pays émergents fin janvier. Sous 1,70%, le Bund allemand à 10 ans reste cependant proche de ses plus bas de 2014 soit plus de 20pdb sous les niveaux de fin d’année. De fait, les Banques Centrales hors Zone Euro ont soutenu le marché. Ces flux acheteurs ont également bénéficié à l’OAT française. En revanche, les acteurs finaux (banques, gestionnaires d’actifs) étaient de nouveau vendeurs de dette core après le fort mouvement de couverture des positions vendeuses en début de mois.
Du point de vue des valorisations, nous restons convaincus que les niveaux actuels se justifient par le biais de la BCE et le niveau faible de l’inflation. La valeur d’équilibre estimée ressort ainsi à 1,55%.
Sur le plan technique, l’action des prix semble indiquer des prises de profit après l’emballement ayant permis au contrat Bund mars 2014 de dépasser 144,50. Nous optons pour un biais légèrement vendeur vers le prochain support situé autour de 143,09. Concernant la courbe, le spread 10 ans – 30 ans devrait s’aplatir de nouveau grâce à la forte demande lors des adjudications de 30 ans belge et néerlandais.
Sur les Treasuries, l’indécision prédomine entre 125-07+ et 126-15+ sur le contrat d’échéance mars 2014. Le courant acheteur semble s’atténuer sans toutefois pointer un fort risque à la baisse sur le marché américain à court terme. Nous privilégions cependant une position légèrement vendeuse sur les Treasuries et maintenons la vue à l’aplatissement du segment 2 ans - 10 ans.
Bonos et BTPs sous les 200pdb
Les spreads périphériques continuent d’attirer les flux fuyant les pays émergents. Malgré la démission d’Enrico Letta, le risque politique apparaît contenu en Italie même si Matteo Renzi aura sans doute quelques difficultés à former un nouveau gouvernement de coalition. Le spread italien après une légère tension a repris sa tendance à la baisse et s’affiche désormais sous les 200pdb.
Les fonds spéculatifs ont cherché à profiter des tensions politiques avant de couvrir leurs positions face aux achats des banques et des gestions.
Les Bonos espagnols profitent néanmoins de la situation pour surperformer la dette transalpine, du fait notamment de la demande des non-résidents. Le 10 ans espagnol traite 8pdb sous les BTP à 185pdb. Les marchés espagnols et italiens sont en hausse de 3,6% et 2,8% respectivement depuis le début de l’année. Il convient de rester surexposé sur les Bonos et, à un degré moindre, sur les BTPs.
Au sein des pays core, la dette néerlandaise est fortement demandée grâce à la bonne surprise sur la croissance au 4T13. Le spread des DSLs à 10 ans est stable autour de 22pdb. Le DSL 30 ans s’affiche néanmoins à l’écartement, en raison de valorisations tendues. A l’inverse, on observe des dégagements sur le segment 5-10 ans sur les semi-core (France-Belgique) concurrencés par le rally des périphériques malgré les flux des Banques Centrales acheteuses d’OAT. En termes de stratégies, nous recommandons la vente du 5 ans français ainsi qu’une sous-exposition à la Finlande (conjoncture dégradée et spread peu attrayant) et aux DSLs à long terme.
Allocation d’actifs : surperformance des souverains
Le crédit tend à sous-performer les souverains depuis le début de l’année en raison d’un certain manque de liquidité sur le marché secondaire et de la normalisation de la hiérarchie des risques. L’intérêt des investisseurs pour le primaire reste cependant indéniable compte tenu des excédents de trésorerie existants.
Dans les portefeuilles diversifiés, une surexposition est maintenue sur l’investment grade ainsi que sur les covered bonds (notamment émises par les entités périphériques) préférées aux dettes d’agences gouvernementales.
En revanche, les paris plus risqués sont limités au high yield au détriment des obligations convertibles et des émergents jugés trop risqués à court terme.