Comment expliquez-vous la multiplication des opérations de fusion dans le secteur de l’Asset management, en particulier en France ?
Pascal Koenig : Effectivement, les opérations de rapprochement, recherche de nouveaux actionnaires, transferts d’équipes se sont multipliées en France ces derniers mois. Il s’agit à la fois d’opérations « stratégiques » (complément d’équipes de gestion, positionnement sur des secteurs de la distribution, besoin de nouveaux financements pour accélérer le développement…) mais aussi plus basiquement de recherches d’économies d’échelle par une augmentation des encours afin de mieux amortir les couts des fonctions supports et faire face à la pression sur les prix. Nous pensons donc que ces mouvements de concentration devraient se poursuivre, y compris chez les acteurs de premier plan.
Embrasser les nouvelles technologies et la numérisation. Est-ce une solution pour sauvegarder les marges des gérants d’actifs ?
Les investissements réalisés dans les nouvelles technologies augmenteront significativement dans les prochaines années et devraient permettre des améliorations sur l’ensemble de la chaine de valeurs, aussi bien au niveau des fonctions de front office, de distribution et d’infrastructure. Pourtant, même si la majorité des sociétés de gestion hésitent encore à s’engager dans une telle démarche, celles qui sont passés à l’acte réalisent aujourd’hui des gains de productivité permettant de sauvegarder leurs marges.
Dans le contexte actuel de taux bas, d’une compétition acharnée sur les appels d’offres institutionnels et sous la pression de la gestion passive, la tendance est clairement à la baisse des prix de vente de la gestion…Pascal Koenig, associé, responsable du secteur Asset Management chez Deloitte
Observez-vous une tendance à la baisse sur les frais de gestion ?
Oui, dans le contexte actuel de taux bas, d’une compétition acharnée sur les appels d’offres institutionnels et sous la pression de la gestion passive, la tendance est clairement à la baisse des prix de vente de la gestion. Cependant, certaines niches de gestion ou pans de distribution bénéficient encore à ce jour de marges honorables.
Quel avenir pour la gestion active face aux ETF ?
Les ETF représentent aujourd’hui environ 15 % du total des encours des fonds ouverts en Europe. L’an dernier, ces encours ont certes progressé mais moins qu’attendu par les spécialistes du secteur, ce qui nous renforce dans l’idée que la gestion vraiment active aura toujours une place à part entière dans l’industrie.
Est que l’ISR / ESG est le prochain vecteur de croissance pour la gestion d’actifs ?
Difficile d’ignorer le fort engouement actuel pour les produits ISR. Ainsi la croissance de la collecte ressort en hausse de +2,7 % en France, en 2018 dont +35 % pour l’ISR de conviction. D’ailleurs, la France est devenue la deuxième place financière verte mondiale avec 7 des 10 fonds européens les plus performants sur le climat.
Quid des stratégies alternatives ? Ces stratégies arrivent elles à délivrer leur promesse de rendements décorélés des marchés ?
Si dans gestion alternative, vous entendez portefeuilles investis dans des produits tangibles, nous ne pouvons que constater l’attrait et l’appétence pour ce type de produits. Les SCPI et OPCI continuent de collecter fortement (à un rythme moins élevé cependant qu’en 2017) et délivrer des performances plus qu’acceptables. Coté Private Equity, la tendance est identique. L’enjeu pour les sociétés de gestion est d’identifier des biens à acheter à des prix encore raisonnables afin de pouvoir délivrer la promesse de rendement.