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Philippe Weber : « On devrait échapper à une rechute ! »

Selon Philippe Weber, Responsable Etudes et Stratégie chez CPR AM, il y a une probabilité de 60 % à la poursuite d’une croissance un peu atone, et de 40 % à une rechute...

Les risques de rechute de l’activité économique se sont-ils récemment accrus ?

Je dirais plutôt que la perception de ces risques s’est accrue. Dans le courant de l’été, les signaux négatifs sont devenus plus nombreux, notamment aux Etats-Unis. Les marchés financiers se sont, apparemment, emparés du thème d’une rechute économique. Il est vrai que le second semestre sera, selon toute vraisemblance, plus terne que le premier. Mais il n’y a là rien qui ne pouvait être anticipé depuis un moment : une part non négligeable du rebond, plus vigoureux que ce nous attendions à CPR AM, venait de facteurs techniques, comme la reconstitution des stocks ou même l’arrêt du déstockage, ou exogènes, comme les plans de relance ou les mesures fiscales décidées dans beaucoup de pays. Il n’est pas surprenant que, une fois ces effets difficilement reconductibles épuisés, la croissance semble s’affaiblir. Cela ne signifie pas une rechute - pas forcément en tout cas ! Ce qui a sans doute inquiété est la conjonction de chiffres médiocres, et dans certains cas carrément mauvais, et de signes d’inquiétude manifestés, notamment, par les banquiers centraux.

Quels ont été les signes les plus inquiétants ?

Il faut tout d’abord parler du logement aux Etats-Unis. Certes, il ne représente plus que 2,5 % du PIB contre 4,5 % en moyenne avant la dernière bulle et plus de 6 % au sommet. Mais ce secteur reste crucial, car c’est une part importante du patrimoine des ménages, c’est un gros employeur, et le secteur financier y est très impliqué. Or, les derniers chiffres de ventes de logements sont carrément mauvais. On attendait bien sûr un recul (les ventes avaient été amplifiées par un avantage fiscal qui expirait le 30 avril), mais pas une chute libre. Les ventes sont au plus bas depuis que les statistiques existent - 1963, pour les logements neufs. La construction s’est un peu ressaisie, mais, rapportée à la population, elle est de moitié plus basse que lors des pires crises passées. Il est vrai qu’on peut arguer que, arrivé à ce point, le secteur ne peut que se redresser. Mais le maintien d’un taux élevé de défaut et des saisies toujours nombreuses font peser un risque significatif.

Guère rassurant en effet...

Et ce n’est pas tout ; l’emploi n’est pas totalement rassurant, même si, au mois d’août, l’emploi privé a donné des signes de frémissement. Pendant la dernière récession, la baisse de l’emploi a été la plus forte depuis la guerre, et, depuis que la récession est finie (sans doute à l’été 2009), il ne redémarre que bien plus timidement que d’ordinaire. De plus, le chômage de longue durée s’est accru dans des proportions sans précédent. On peut aussi noter le fait que les enquêtes de conjoncture marquent le pas, à un niveau certes très élevé dans l’industrie, mais très bas pour les ménages, et reculent même dans la construction. Enfin, le changement de ton de la Réserve fédérale a sans doute joué un rôle dans l’excès de pessimisme des marchés. En effet, elle a pris acte, au début du mois d’août, du ralentissement à l’oeuvre, le jugeant décevant, et a annoncé qu’elle maintiendrait la taille de son bilan. Rien de très étonnant en soi, mais cela a servi en quelque sorte de révélateur.

Donc il faut craindre une rechute, un profil en « W » ?

Le craindre, oui ! Mais ce n’est pas pour nous, à ce stade, le plus probable. Même si l’on élimine les effets des stocks et des dépenses publiques, la croissance s’est rétablie et devrait se maintenir entre 1,5 et 2 % - rien d’extraordinaire, mais rien de catastrophique. On peut légitimement espérer que le logement va rebondir à partir des niveaux anormalement bas qu’il a atteints, et que les baisses violentes qu’il a connues n’étaient qu’une réaction, un peu plus forte qu’escompté, à l’arrêt des aides fiscales. On peut aussi penser que les autorités monétaires et politiques feront tout pour éviter une rechute, encore que, de ce point de vue, ils ne puissent plus faire grand-chose. Au total, nous donnons une probabilité de 60 % à la poursuite d’une croissance un peu atone, et de 40 % à une rechute - c’est déjà beaucoup !

Next Finance Septembre 2010

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