Nous analysons également comment les différentes stratégies environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) y répondent pour montrer que les règles fonctionnent bien pour certains types de stratégies, mais pas pour d’autres.
Comprenez-vous bien les enjeux des COP ?
L’actualité ESG de novembre et décembre a indéniablement été dominée par la COP27, et peut-être pour certains par la COP15, moins connue mais tout aussi importante.
Bien qu’il y ait eu peu d’espoir à l’approche des négociations de la COP27, la session a joué les prolongations et les tirs au but pour permettre la conclusion d’un accord historique sur les pertes et dommages, qui permettra la création d’un fonds pour aider les pays les plus pauvres touchés par les impacts du changement climatique. Cependant, les détails sur la manière dont cela sera financé n’ont pas encore été débattus.
Au-delà de l’annonce très médiatisée sur les pertes et dommages, un autre élément clé de notre analyse de la COP27 indique que la nature prend une importance croissante. En particulier, le Plan de mise en œuvre de Charm el-Cheikh (du nom du communiqué final) a expressément désigné comme domaines clés pour les travaux ultérieurs l’eau et les océans, les forêts, la déforestation et l’agriculture. Cela est lié aux annonces faites en marge de la COP. Le Brésil, l’Indonésie et la République démocratique du Congo (RDC) ont en effet annoncé une alliance stratégique sur les forêts tropicales surnommée « l’OPEP pour les forêts tropicales », tandis que l’ONU a lancé « FAST » pour augmenter les contributions financières à l’agriculture et aux systèmes alimentaires dans le cadre de la transition climatique.
Cela a tout naturellement mené à l’« autre COP » qui a eu lieu à Montréal en décembre, où l’on espérait qu’un accord historique pour la nature semblable à l’Accord de Paris serait conclu. Bien que cet accord n’ait peut-être pas été aussi ambitieux que ses promoteurs l’espéraient, il a été convenu d’un objectif de préservation des habitats terrestres et aquatiques mondiaux de 30 %. Cet accord comprend un total de 23 objectifs distincts. Il s’agit notamment de réduire de moitié les déchets alimentaires et d’introduire des rapports sur la biodiversité par les entreprises et les institutions financières.
L’analyse d’Invesco
Vous ne comprenez pas bien en quoi consiste la taxonomie de l’UE ? Nous offrons une perspective pratique sur les implications de l’établissement de seuils d’alignement sur la taxonomie de l’UE pour les portefeuilles d’investissement. Une conclusion importante sur ce point est que même un alignement modéré sur la taxonomie de 30 % au niveau du portefeuille conduirait à un portefeuille très concentré d’environ 75 actions et à une erreur de suivi significative. Augmenter l’alignement sur la taxonomie a également des répercussions sur les portefeuilles obligataires, notamment une augmentation du risque de duration et une diminution de la qualité du crédit.
La finance durable européenne plus en détail
Lorsqu’il pleut, il tombe des cordes : alors que les entreprises approchent de la dernière ligne droite pour la mise en œuvre du règlement SFDR de l’UE (portant sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers), l’échéance étant en fin d’année1, les autorités réglementaires européennes ont publié une pléthore de consultations et de documents s’ajoutant à la charge de travail. La plus importante a été la consultation surprise de l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA en anglais) visant à introduire des exigences minimales pour les fonds ESG2.
Les fonds incluant la dénomination ESG devraient ainsi s’assurer que la politique d’investissement ESG s’applique à 80 % des actifs du fonds. L’ESMA a également établi une liste exhaustive d’exclusions minimales et, pour ceux qui utilisent le terme « durable », l’inclusion de 50 % d’investissements durables3. Bien que beaucoup pourraient grommeler que ces règles sont plus contraignantes, elles le sont quand même moins que le label écologique sur lequel la Commission européenne travaillait (et qu’elle semble avoir discrètement abandonné). En effet, l’ESMA estimait que seulement 0,5 % du marché aurait pu obtenir ce label.
Pour terminer ce tour de passe-passe, les Autorités européennes de surveillance (AES)4 ont également publié toute une série de FAQ sur le règlement SFDR et une consultation sur le « greenwashing » dans le secteur5. La bonne nouvelle est peut-être le fait que les AES ont notifié à la Commission européenne que l’échéance pour l’examen des Principales Incidences Négatives (« principle adverse impacts »/PAI en anglais), fixée initialement en avril 2023, a été repoussée de six mois6.
J’ai 99 problèmes et l’ESRS est l’un d’eux : ou 84 pour être précis. Alors que la Directive relative aux rapports sur le développement durable vient finalement d’être ratifiée par l’UE, le Groupe consultatif pour l’information financière en Europe (EFRAG)7 a publié son avis final sur les normes de reporting en matière de durabilité qui sous-tendent le régime8. Les investisseurs réclament depuis longtemps davantage de données ESG de meilleure qualité, mais peut-être que les normes européennes de reporting sur le développement durable (ESRS) prouvent que l’excès nuit en toute chose ?
En réponse aux préoccupations concernant la pléthore de données requises, l’EFRAG a fait valoir que les règles finales sont très simples par rapport à celles envisagées dans le projet de texte. Il a réduit le nombre d’exigences en matière d’obligations de publication de 136 à 84, et le nombre de points de données quantitatifs et qualitatifs de 2 161 à 1 144. Mais c’est encore beaucoup de déclarations obligatoires !
La phase de transition supplémentaire de un à trois ans ne fera que réduire très légèrement le problème que cela pose aux entreprises. Bien sûr, rien n’est définitif, car cet avis doit encore être approuvé par la Commission européenne. Les parties prenantes ont donc toujours la possibilité de promouvoir une plus grande simplification et un alignement plus poussé sur les prochaines normes de l’International Sustainability Standards Board (ISSB).
Par ailleurs, la Financial Conduct Authority (FCA) britannique9 a publié ses conclusions pour la première série de rapports dans le cadre des nouvelles exigences de reporting du TCFD. Elle a annoncé des projets visant à aligner le régime sur les nouvelles normes de l’ISSB, et à passer à une conformité obligatoire.
L’arbre qui cache la forêt : La Plate-forme sur la finance durable 1.0 a publié son rapport final avec quelques critères supplémentaires pour les quatre objectifs liés à la nature ainsi que quelques recommandations plus générales à la Commission européenne10. Toutefois, il est apparu ici aussi des divisions au sein de la plate-forme qui ont conduit certains membres à la quitter, certains membres n’étant pas d’accord sur les critères proposés concernant les forêts. La Plate-forme est également revenue sur le thème de ses précédents rapports, à savoir les problèmes pratiques liés au critère « ne pas causer de préjudice important » (« do no significant harm »/DNSH).
Par ailleurs, la Commission européenne a également publié deux notes d’orientation destinées à aider les entreprises à se préparer à la publication de rapports conformes à la taxonomie en 2023.
Secteur bancaire : La Banque centrale européenne (BCE) a publié les conclusions de son examen thématique des approches des banques en matière de climat et de risque environnemental. En résumé : « peuvent mieux faire »11. Bien que 85 % des banques évaluées aient apporté des améliorations depuis l’an dernier, une petite minorité n’a pas fait grand-chose pour se conformer aux directives de la BCE.
Parmi celles qui ont fait des progrès, l’analyse reste très incomplète pour 60 % d’entre elles, et si 55 % des banques ont des politiques en théorie, il n’est pas clair que celles-ci soient effectivement appliquées.
Dans le même ordre d’idées, la Commission européenne a demandé à l’Autorité bancaire européenne (ABE) d’examiner la façon de définir les prêts et crédits hypothécaires verts pour les particuliers et les PME afin d’améliorer l’accès à la finance verte d’ici fin 202312. L’ABE a mis à jour sa feuille de route pour le développement durable afin de refléter tous les projets en cours13.
Tests de stress dans l’assurance : L’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP) a publié les conclusions de son test de résistance au changement climatique 2022 des Institutions européennes de retraite professionnelle (IERP). L’autorité réglementaire a constaté que dans son scénario défavorable, les risques liés à la transition climatique pourraient entraîner des pertes de 12,9 %, ce qui implique des pertes globales de valorisation des actifs de 255 milliards d’euros. Mais la conclusion de l’AEAPP est que ces pertes n’auraient pas d’impact sur la résilience financière de la plus grande partie des IERP, les ratios de financement de la plupart des régimes à prestations définies restant au-dessus de 100 %14.
L’AEAPP a également publié un document de travail sur la façon dont les risques de durabilité15 pourraient être intégrés dans le traitement prudentiel dans le cadre de Solvabilité II16.
Codification : la FCA a annoncé la création d’un nouveau Code de conduite pour les fournisseurs de données et de notations ESG. Sous la direction de l’International Regulatory Strategy Group (IRSG) et de l’ICMA, M&G, LSEG, Moody’s et Slaughter & May coprésideront les travaux17.
Développements à l’international
Négociation du carbone : L’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) mène actuellement des consultations sur la façon d’améliorer le fonctionnement des marchés des crédits carbone. Cela comprend les marchés du carbone obligatoires comme ceux des quotas de carbone dans le cadre du système de négociation des quotas d’émission de l’UE18, ainsi que le développement à grande échelle des marchés du carbone et des crédits compensatoires volontaires19. Bien que les problèmes de chaque marché soient légèrement différents, ils ont tous en commun les thèmes centraux de la transparence, de l’écosystème de négociation et de l’interopérabilité.
Taxonomie : La Taxonomie de l’UE n’est pas la seule existante. La Malaisie et l’Australie ont toutes deux publié des versions provisoires pour leurs propres taxonomies. La taxonomie malaisienne se fonde sur des principes20 (par opposition à l’approche fondée sur des règles dans l’UE) et couvre à la fois des objectifs environnementaux et sociaux. Les travaux australiens présentent des recommandations pour l’élaboration d’un projet pour les antipodes, comprenant des critères par entité et par activité et une transition21.
Données, données, données : Le Net Zero Public Data Utility a publié ses recommandations finales sur le contenu et les fonctionnalités que devraient offrir un outil de données ouvert qui serait gratuit et accessible à tous.
La Suisse a également introduit des obligations de déclaration sur le changement climatique fondées sur le Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (TCFD) pour toutes les grandes entreprises. Ces règles entreront en vigueur le 1er janvier 202422.
Encore et toujours la transition : Le Groupe de travail sur le plan de transition a publié ses dernières propositions pour des déclarations sur la transition « best-in-class ». Le cadre, construit autour des trois piliers « Ambition, Action et Responsabilité », vise à s’appuyer sur les orientations existantes du TCFD relatives à la planification de la transition23.
Par ailleurs, la plate-forme internationale sur le financement durable a publié son rapport sur le financement de la transition. Il comprend une cartographie des cadres existants et définit un ensemble de principes communs pour le financement de la transition, privilégiant des objectifs de transition solides et une exécution crédible24.
Climat et politique budgétaire
Quand un plafond sur le prix de l’essence n’est-il pas un plafond sur le prix de l’essence ? La réponse semble être lorsque les seuils de déclenchement de son application sont si élevés qu’il n’est jamais utilisé. Ou du moins, c’est la critique de plusieurs États membres de l’UE qui se plaignent que le « mécanisme de correction du marché » tant attendu de la Commission européenne a placé la barre trop haut. Ce mécanisme définit un plafond de 275 € et d’autres conditions d’application qui garantissent qu’il ne sera jamais activé25. L’accord final, conclu en décembre, a réduit ce seuil à 180 euros, mais il est encore bien au-dessus des prix actuels du gaz sur le marché26.
Fitfor55 : L’UE a franchi plusieurs étapes sur la voie de son objectif de neutralité climatique. Des négociations sur certains dossiers clés ont été menées à bien, notamment sur le système révisé d’échange des droits d’émission, le mécanisme d’ajustement aux frontières du carbone et le Fonds social pour le climat. De nouvelles règles pour accélérer le déploiement des projets renouvelables et interdire les produits qui contribuent à la déforestation ont également été définies.
Les États membres ont également progressé vers un accord sur la réduction drastique des émissions de méthane et l’introduction d’une diligence raisonnable obligatoire en matière d’environnement et de droits de l’homme pour les grandes entreprises.
Réduction des déchets en repensant les emballages : la Commission européenne a proposé de nouvelles règles à l’échelle de l’UE en matière d’emballage. Celles-ci visent à réduire les déchets et incluent des exigences en matière d’options d’emballages réutilisables. Elle espère ainsi se débarrasser des emballages inutiles, limiter le suremballage et fournir des étiquettes claires pour faciliter un recyclage correct.
Valoriser la nature : Le gouvernement Biden a dévoilé une nouvelle feuille de route pour des solutions fondées sur la nature qui recommande aux administrations de mettre à jour les politiques et directives fédérales. Cela facilitera l’examen et l’adoption de solutions fondées sur la nature. Les principaux domaines à améliorer comprennent les politiques et directives pour la planification fédérale, les permis, le partage des coûts, la gestion des risques et l’analyse coûts/bénéfices.