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François Lhabitant : « Nous avons reçu des dizaines de propositions mais un seul gérant long/short a passé notre sélection ! »

Créé en 2001, Kedge Capital gère la fortune de la famille Bertarelli. La société investit avec succès près de $6 milliards [1] dans des fonds alternatifs, pour une performance nette annuelle de 6.7% depuis sa création.

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Entretien avec son Directeur Général et Responsable des Investissements, François-Serge Lhabitant…

Next-Finance : Votre performance depuis 2001 est de 6,7% par an en moyenne, après déduction des frais. Depuis 2009, vous avez gagné 7,6% par an net de frais. Sur quels critères se fondent vos processus de gestion et de sélection des gérants alternatifs ?

François-Serge Lhabitant : Quelques règles simples,
- (1) rester concentré en termes de nombre de gérants [2], mais diversifié en termes de stratégies, géographies et positions sous-jacentes.
- (2) n’investir qu’avec des gérants que nous considérons comme blue chip tant opérationnellement que du point de vue investissement ;
- (3) suivre l’activité et les portefeuilles de ces gérants de manière très rapprochée ;
- (4) se focaliser sur l’allocation stratégique, la gestion des risques et la minimisation de la volatilité au niveau de notre portefeuille. Le reste, c’est beaucoup de travail, et une équipe de 25 personnes dédiée à cette activité !

Vos performances sont en opposition avec les assertions actuelles prédisant la disparition des fonds de fonds alternatifs. Quel avenir pour ce segment de la gestion ? Va-t-on vers plus de concentration ?

Malheureusement, je pense que nos performances sont plus une exception qu’une bonne nouvelle pour l’industrie. En moyenne, les performances des fonds de fonds alternatifs ont été un désastre, et seuls quelques-uns tirent leur épingle du jeu. Un grand nombre d’entre eux se débat encore avec des side pockets et autres héritages de 2008, et leurs avoirs sont insuffisants pour financer leur structure opérationnelle. Et les choses ne vont pas s’arranger avec les nouvelles exigences règlementaires (AIFMD, FATCA, etc.) qui nécessitent de faire encore d’avantage d’investissement. De nombreux acteurs sont donc à vendre ou cherchent à s’allier afin d’augmenter leur masse critique. On devrait donc continuer à voir une contraction de cette industrie dans les mois qui viennent.

Ceux qui s’en sortent mieux ont ajusté leurs modèles pour réagir plus rapidement en cas de retournement des marchés, ou ont introduit de nouveaux modèles qui ne sont pas de simples suiveurs de tendances.
François-Serge Lhabitant

Kedge Capital est-il investi dans des fonds « purement quants » de type statistical arbitrage, CTA, HFT, etc… ? Comment analysez-vous les mauvaises performances de cette industrie cette année, et notamment dans les marchés sans grande tendance ?

Nous investissons effectivement dans des fonds quantitatifs, mais pas dans des fonds de trading à haute fréquence. A fin novembre, nos gérants quantitatifs sont positifs en moyenne sur l’année, mais après avoir connu pas mal de volatilité. Notre gérant macro quantitatif affiche de très bonnes performances en 2012, et notre gérant d’arbitrage statistique a eu une bonne année. Par contre, l’absence de grandes tendances durables a créé un environnement difficile pour les CTAs.

Ceux qui s’en sortent mieux ont ajusté leurs modèles pour réagir plus rapidement en cas de retournement des marchés, ou ont introduit de nouveaux modèles qui ne sont pas de simples suiveurs de tendances. C’est là où l’on voit non seulement l’importance de la diversification entre les différentes stratégies de nos gérants quantitatifs, mais aussi la capacité de leurs équipes de recherche d’innover et de s’adapter à un environnement différent.

Vous qui connaissez bien la France, excepté le cas de Capital Fund Managemnt (CFM), comment-expliquez-vous les encours modestes de la Gestion Quantitative Indépendante française au regard des sommes impressionnantes levées par les Quants américains ?

L’environnement règlementaire, politique et fiscal français agit comme un véritable épouvantail pour les investisseurs étrangers. Les institutionnels locaux ont peur d’investir dans les hedge funds car cela leur serait reproché en cas de perte. Qui plus est, les talents français ont de plus en plus tendance à partir là où ils sont mieux accueillis – et non pas traités comme des pestiférés ou des spéculateurs sans foi ni loi. C’est dommage pour la France…

Un seul gérant long/short spécialisé dans les actions européennes a passé notre sélection du coté investissement, mais il a été rejeté par notre due diligence opérationnelle.
François-Serge Lhabitant

Il y a quelques mois, vous recherchiez un gérant long/short spécialisé dans les actions européennes. L’avez-vous enfin trouvé ?

Non, toujours pas. Nous avons reçu des dizaines de propositions, un seul gérant a passé notre sélection du coté investissement, mais il a été rejeté par notre due diligence opérationnelle. Ceci étant dit, nous n’avons pas d’obligation à être investi en actions européennes. Notre portefeuille cherche des sources d’alpha, pas du beta. Donc s’il n’y a pas d’alpha dans un segment de marché, nous n’y sommes pas présents, tout simplement.

Vos fonds sont-ils toujours ouverts à de nouveaux investisseurs et quels sont vos objectifs en terme d’encours pour les deux à trois ans qui viennent ?

Oui, mais uniquement pour des investisseurs qualifiés avec les mêmes attentes que nous en termes de risque et rendement. Pour être clair, nous n’avons aucun objectif en termes d’encours futurs. Notre unique but est de maintenir la qualité et les performances du portefeuille, et la satisfaction de nos investisseurs existants. Si de nouveaux clients veulent nous rejoindre et que nous avons de la capacité à leur offrir, tant mieux. Sinon, tant pis pour eux !

Paul Monthe Décembre 2012

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Notes

[1] dont 5 appartiennent à la famille Bertarelli

[2] entre 15 et 25 gérants

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