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La logique déconnexion des marchés financiers : Comment expliquer l’apparente déconnexion entre la sphère « financière » et « réelle » ?

Jamais la déconnexion n’a semblé aussi profonde entre les marchés financiers et l’économie réelle qu’en 2020. Si l’année s’achève avec l’espoir de voir refluer une deuxième vague épidémique en Europe, continent le plus touché, l’épidémie continue à progresser dans le monde avec environ 4 millions de nouveaux cas recensés par semaine.

Jamais la déconnexion n’a semblé aussi profonde entre les marchés financiers et l’économie réelle qu’en 2020. Si l’année s’achève avec l’espoir de voir refluer une deuxième vague épidémique en Europe, continent le plus touché, l’épidémie continue à progresser dans le monde avec environ 4 millions de nouveaux cas recensés par semaine.

La baisse attendue de la production mondiale est historique : en octobre 2020, le FMI attendait une contraction de 5,9 % du PIB pour les pays du G7, bien plus importante que les -3,6 % enregistrés en 2009, lors de la « Grande Crise Financière ». A l’inverse quand on ne regarde que les performances des actions (MSCI WorldTM +7,7 %), des obligations à haut rendement (3,5% pour l’indice BofA Merrill Lynch Global High Yield constrainedTM), des métaux industriels (+17 % le contrat future sur le cuivre), difficile d’imaginer le caractère exceptionnel de la crise sanitaire de la Covid-19 et les traces durables qu’elle va laisser [1].

Comment expliquer cette apparente déconnexion entre la sphère « financière » et « réelle » ?

Un reprise en "V" cet été, rapidement anticipée par les marchés financiers

La récession liée à la crise sanitaire est de nature très différente de la récession de 2008-2009. L’arrêt de l’activité a été immédiat et temporaire. Une reprise en « V » a bien eu lieu cet été et l’activité nous a surpris par sa vigueur.

Aux Etats-Unis, l’ISM manufacturier a franchi le seuil de 50 à nouveau en juin 2020 pour atteindre 59 en octobre. L’ampleur des stimuli monétaires et fiscaux mis très rapidement en place dès le mois de mars 2020 expliquent la rapidité de sortie de ce choc économique inédit.

En 2008-2009, il avait fallu attendre presque 12 mois pour que l’ISM manufacturier franchisse à nouveau la barre des 50.

Des indices actions et obligations non représentatifs de l’économie réelle

Le choc lié à la crise économique est brutal et temporaire, mais également très inégal selon les secteurs. Des pans entiers de l’activité comme le transport, le tourisme, l’hôtellerie ou la restauration ont été mis à l’arrêt tandis que les services en ligne par exemple ont profité d’une accélération de leur croissance cette année. L’écart entre « gagnants » et « perdants » n’a fait que croître depuis le mois de mars 2020 et se reflète dans un écart spectaculaire de performance entre les entreprises.

Ainsi dans le S&P 500TM, le secteur Internet (S&P500 Internet RetailTM) affiche une performance positive d’environ +50% alors que ceux de l’hôtellerie (S&P500 Hotels Resorts & Cruise linesTM) et de l’aviation (S&P500 AirlinesTM) sont en baisse de respectivement 28 % et 33 % environ [2].

Les valeurs « bénéficiant » de la crise sanitaire sont majoritairement des valeurs dites de « croissance » et appartenant aux secteurs de la technologie, des télécommunications (social media) et de la consommation discrétionnaire (vente en ligne). Elles bénéficient dans cette crise d’un double effet positif sur leur valorisation : meilleures perspectives bénéficiaires et baisse des taux.

Les « megacap », de l’indice S&P 500 leaders incontournables dans ces secteurs ont vu leur poids croitre fortement dans l’indice américain, les GAFAM représentant aujourd’hui plus de 20 % du S&P 500TM [3]. Le poids d’Amazon a quasiment doublé cette année et représente près de 5 % de l’indice. On observe la même concentration dans certains indices émergents : quatre valeurs représentent 25 % du MSCI Emerging MarketsTM [4]. Les indices obligataires reflètent la même tendance : 15 % des émetteurs représentent par exemple 50 % de la capitalisation boursière de l’indice des obligations à haut rendement Euro non financières [5].

Y-a-t-il vraiment une déconnexion entre les marchés financiers et l’économie réelle ou entre les indices boursiers et l’économie réelle ? Le poids très important des valeurs de croissance a été amplifié par la chute historique des taux réels américains. La valorisation des valeurs de croissance progresse quand les taux baissent (on actualise les cash flow à venir des entreprises à un taux plus faible), ce qui accroit leur poids dans l’indice global. L’effet sur l’indice américain est représenté ci-dessous, la valorisation du S&P 500 (ratio cours sur bénéfices à 12 mois) suit la baisse des taux réels américains.

Doit-on anticiper une certaine reconnexion dans l’année à venir ?

La capacité à sortir plus ou moins rapidement de la crise sanitaire reste le principal enjeu pour les prochains mois. A ce titre, la journée du 9 novembre 2020 est révélatrice des mouvements que peuvent connaitre les marchés financiers en 2021. L’annonce de Pfizer – BioNTech des résultats partiels de leur vaccin montrant une efficacité de 90% a entrainé une surperformance historique des « values » par rapport aux valeurs de « croissance » dans la journée.

Pour reprendre l’exemple précédent, on a observé une baisse de 4 % pour le secteur Internet, et une hausse de 19 % et 15 % pour les secteurs de l’hôtellerie et l’aviation ce même jour.

Une sortie progressive de la crise sanitaire et le rebond de l’activité économique devraient permettre aux marchés financiers de progresser avec une base plus large de valeurs et une meilleure représentativité de l’économie réelle. Le sentiment de déconnexion devrait se réduire si cette rotation se poursuit l’an prochain.

Il n’en reste pas moins que la crise du Covid-19 a accéléré des tendances perceptibles avant la crise et favorables aux thématiques proteuses d’une plus forte croissance à moyen terme dans les secteurs liés à la technologie, à l’innovation et l’environnement. Dans un environnement où les taux réels ne peuvent pas fortement progresser, le décalage entre marchés financiers et économie réelle va perdurer.

Florence Pisani , Nadège Dufossé Décembre 2020

Notes

[1] Source Bloomberg, données au 20 novembre 2020. Données en USD

Les performances passées ne sont pas des indicateurs fiables des performances futures.

Les performances exprimées dans une monnaie autre que celle du pays de résidence de l’investisseur sont soumises à des fluctuations de taux de change, avec un impact négatif ou positif sur les gains

[2] Source Bloomberg, données au 20 novembre 2020. Données en USD

Les performances passées ne sont pas des indicateurs fiables des performances futures.

Les performances exprimées dans une monnaie autre que celle du pays de résidence de l’investisseur sont soumises à des fluctuations de taux de change, avec un impact négatif ou positif sur les gains

[3] Source Bloomberg, données au 20 novembre 2020

[4] Source Bloomberg, données au 20 novembre 2020. Top 25% MSCI EM : Alibaba, Tencent, TSMC et Samsung représentent respectivement 8,8 %, 6,7 %, 5,7 % et 3,7 % de l’indice.

[5] Source Bloomberg, données au 20 novembre 2020.

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