Le 13 juin 2012, le Parlement et le Conseil européens ont entériné un texte de compromis concernant la directive sur l’efficacité énergétique. Celui-ci devrait permettre de réduire de 17 % la consommation énergétique primaire européenne d’ici 2020. Avec l’adoption attendue en septembre 2012 de cette troisième pièce du paquet législatif « énergie-climat », la question de la coordination des politiques d’énergies renouvelables (EnR) et d’efficacité énergétique avec l’EU ETS en matière de réduction des émissions de CO2 est posée.
Alors que le prix de l’EUA oscille dans une fourchette de 6 à 9 €/t depuis plus de
6 mois, la Commission européenne va proposer en juillet des mesures pour « renforcer
le marché du carbone et le rendre plus efficace ». L’évaluation du poids de chaque
politique dans les réductions d’émissions de CO2 est alors cruciale pour jauger de la
réelle contribution de l’EU ETS. Dès l‘adoption du paquet « énergie-climat » en 2008,
il était clair que les objectifs de développement d’EnR et d’efficacité énergétique
et les politiques incitatives nationales afférentes (tarifs de rachats, subvention des
rénovations dans le bâtiment…) allaient contribuer significativement à l’atteinte de
l’objectif de réduction d’émissions de – 20 % d’ici 2020. D’après l’analyse d’impact de
la Commission, le niveau de contrainte fixé pour les secteurs énergétiques et industriels
« ETS » impliquait une réduction d’émission de 5 GtCO2 par rapport au scénario BAU [1] sur la période 2008-2020. Quelle part de cet effort est attribuable aux autres politiques ?
En utilisant les chiffres communiqués par les États membres dans leurs rapports d’étape sur le développement des EnR, nous estimons que la croissance de la production d’EnR a réduit de 116 MtCO2 en 2010 dans le périmètre de l’EU ETS et réduira de 3,2 GtCO2 sur la période 2008-2020, soit 63 % de l’effort à fournir, si les objectifs sont tenus.
Au regard de l’analyse d’impact de la directive efficacité énergétique publiée par la Commission en juin 2011, celle-ci pourrait encore réduire de 450 à 650 MtCO2 les émissions de CO2 dans ce même périmètre.
Dès l’origine, la combinaison de ces politiques permettait donc une réduction d’environ 3,7 GtCO2 d’ici 2020, laissant 1,3 GtCO2 de réductions d’émissions résiduelles à l’EU ETS, soit 25 % de l’effort à fournir. En incluant l’utilisation possible par les installations d’1,6 GtCO2 issues de crédits Kyoto et en cas d’atteinte des deux autres objectifs, l’effort net domestique demandé à l’EU ETS était nul. Depuis, les émissions de CO2 des secteurs de l’EU ETS se sont fortement réduites en raison de la crise tandis que les réductions d’émissions dues aux autres politiques sont moins sensibles à la conjoncture économique, sauf en cas de restriction budgétaire des États Membres. L’ajustement à la situation macroéconomique actuelle se fait dès lors sur la demande d’EUA.
L’offre de quotas jusqu’en 2020 a été fixée ex ante sur la base de données antérieures au ralentissement de l’activité et sont désormais obsolètes. Ce déséquilibre est largement constaté par les observateurs et une intervention à court terme sous la forme d’un décalage du calendrier de mise aux enchères de 400 et 1 200 MtCO2 de quotas, accompagnée de réformes structurelles de long terme devrait être proposées par la Commission. Si le but du renforcement annoncé de l’EU ETS est d’améliorer la prévisibilité du prix du CO2 pour favoriser les investissements « bas-carbone », une première étape serait de rendre systématique l’évaluation continue de l’impact des autres politiques sur les réductions d’émissions induites dans le périmètre de l’EU ETS. Celle-ci alimenterait la réflexion sur l’opportunité d’introduire des mécanismes d’ajustement de l’offre de quotas pour garantir un rôle à jouer à l’EU ETS. La réserve volontaire pour l’énergie renouvelable du marché du carbone californien qui sera lancé au 1er janvier 2013 est un exemple de la forme qu’un tel mécanisme pourrait prendre.