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Zone Euro : l’équation à 3 inconnues

Malgré une baisse de la volatilité sur les marchés et le récent rebond des indices actions en Europe (après plus de 10% de baisse en deux mois), le risque reste sous-jacent.

Les derniers chiffres de la croissance de la France et de l’Allemagne ont cristallisé les attentions mais ils ne sont que les témoins d’une zone euro qui traverse une nouvelle phase de turbulence. La croissance nulle de la France, au deuxième trimestre après un premier trimestre identique, a certes déçu mais elle soulève moins d’interrogations que l’affaiblissement de la croissance allemande. Le PIB Outre-Rhin a reculé de 0.2% contre une croissance de 0.7% au premier trimestre. Ces chiffres s’ajoutent à ceux de l’Italie qui entre une nouvelle fois en récession et confirment que les 3 premières puissances économiques européennes (et plus largement la zone euro) peinent à trouver un second souffle économique après le début de reprise qui a suivi la phase aigüe de la crise de la dette.

L’équation permettant un retour plus durable de la croissance comporte encore 3 inconnues majeures.

La première concerne l’évolution de la politique monétaire européenne dans cette nouvelle phase de ralentissement. En effet, cette croissance fragile s’accompagne d’une faible inflation (0.4% en juillet).

Sachant que l’objectif d’inflation fixé par la BCE (lui permettant d’exercer pleinement son mandat) est de 2%, la banque centrale européenne est 1.6% en dessous de ses objectifs…

ou encore, il faudrait une inflation cinq fois supérieure pour renter dans les objectifs de stabilité des prix.

Lors de sa dernière intervention, Mario Draghi a reconnu que les anticipations d’inflation à court terme se sont éloignées de l’objectif mais maintient que les anticipations à moyen terme restent « fermement ancrées ». La BCE observe donc un statu quo dans l’attente de voir les effets des mesures décidées en juin produire leurs effets : LTRO ciblés pour les banques de la zone euro, baisse de taux et même taux négatif pour les dépôts, fin de la stérilisation du programme SMP et revitalisation du marché des ABS (titrisation) avec la confirmation que la politique monétaire resterait accommodante aussi longtemps que nécessaire…

Pas suffisant pour les marchés et notamment les marchés actions européens qui ont entamé un mouvement de correction de 10% depuis…pourquoi ? Parce que la mesure la plus attendue, à savoir le quantitative easing (achat massif d’actifs), reste pour l’instant à l’état d’hypothèse.

La première inconnue réside donc dans la mise en place potentielle de ces achats d’actifs. Le FMI invite régulièrement la banque centrale à conserver le cap de l’assouplissement monétaire pour favoriser la reprise économique, mêmes incitations du côté des Etats-Unis. Même si Mario Draghi semble inflexible pour l’instant sur de nouvelles mesures, il a toutefois cité à plusieurs reprises, lors des deux dernières réunions, le risque géopolitique comme risque principal avec un suivi attentif de la part de la BCE.

La feuille de route de la BCE pourrait donc être rapidement revue si la crise entre l’Ukraine et la Russie venait à s’aggraver dans les semaines qui viennent.

Cette crise constitue la deuxième inconnue. La réaction des marchés financiers témoigne de l’attention prêtée à l’évolution du conflit et des sanctions. Vendredi dernier, plusieurs chiffres économiques US pourtant en-dessous des attentes (confiance consommateurs/Michigan et indice manufacturier Empire State) n’ont pas fait réagir les marchés alors que l’annonce par Kiev de la destruction partielle d’une colonne de blindés russe a brutalement fait chuter les marchés européens et américains. Le CAC qui évoluait dans la zone des 4250 points a rapidement décroché de 100 points pour venir flirter avec les 4150 points… Cet épisode de tension traduit la nervosité sous-jacente des marchés (et pas seulement des marchés européens) dans ce contexte politiques et militaires entre l’Ukraine et la Russie.

Le FMI a également souligné le danger et le risque de contagion difficilement mesurables de cette crise avec l’impact sur le commerce international, les flux de capitaux ou encore les investissements directs étrangers.

De la durabilité de cette crise dépendra en partie le rebond économique européen car même si aujourd’hui on ne peut imputer le trou d’air économique en Allemagne au 2ème trimestre uniquement à cette situation, les sanctions prises par l’Europe (et la Russie en rétorsion) ainsi que leur possible extension et durée, érodent les indicateurs de confiance économique tel que le ZEW ou en encore l’IFO.

Le sommet prévu le 26 août à Minsk réunissant les dirigeants européens et les présidents russe et ukrainien n’est pas un gage de sortie de crise…

La troisième inconnue concerne le cœur de la zone euro et les relations franco-allemandes. Les mauvais chiffres de la croissance au deuxième trimestre font ressortir les divergences.

La France juge l’euro trop élevé là où l’Allemagne par la voix de Jens Weidmann, président de la puissante Bundesbank, juge qu’une Europe forte se doit d’avoir une devise forte.

Lorsque la France lance un appel à Allemagne à plus de soutien à la croissance, Berlin ne voit aucune nécessité de changer la trajectoire de sa politique économique. Là où l’Allemagne plaide pour une accélération du rythme des réformes en France, cette dernière plaide pour une stimulation de la demande intérieure allemande pour rééquilibrer les balances commerciales… La BCE ménage les deux parties en appelant à des réformes compatibles avec la croissance.

Après l’avertissement des chiffres du deuxième trimestre, les rapports du couple franco-allemands et les décisions prises (ainsi que le rythme des réformes) seront décisifs pour relancer la dynamique de croissance. La zone euro qui s’est dotée de plusieurs pare-feu dont des pare-feu financiers sera observée par les marchés… même si ces derniers sont plutôt cléments ces derniers mois : le taux du 10 ans français est tombé sous 1.34% la semaine dernière, celui de l’Allemagne sous 0.95%, nouveaux records historiques à la baisse. Traduction d’un mélange d’aversion au risque sur la crise ukrainienne, de recherche de rendement et de spéculation sur une possible intervention massive de la BCE.

Alexandre Baradez Août 2014

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