Next Finance English Flag Drapeau Francais
Emploi Formation Rechercher

Et si l’Europe se mettait en ordre de marche ?

Le rapprochement entre les États-Unis et la Russie a surpris les responsables européens. Mais nous pensons que les derniers signes d’une redéfinition du paysage géopolitique pourraient être bénéfiques pour les marchés si les décideurs politiques de l’Union européenne sont poussés à agir pour revoir les dépenses de défense et stimuler la compétitivité...

Le rapprochement entre les États-Unis et la Russie a surpris les responsables européens. Mais nous pensons que les derniers signes d’une redéfinition du paysage géopolitique pourraient être bénéfiques pour les marchés si les décideurs politiques de l’Union européenne sont poussés à agir pour revoir les dépenses de défense et stimuler la compétitivité afin d’empêcher l’UE de se laisser distancer par les États-Unis et la Chine.

Le changement de politique des États-Unis à l’égard de la guerre entre la Russie et l’Ukraine a redéfini le paysage géopolitique et a des répercussions considérables sur les politiques européennes et les marchés financiers.

Points clés

  • L’augmentation des budgets de défense européens et l’accent mis sur la déréglementation peuvent stimuler la croissance économique à court terme et créer des opportunités pour les investisseurs institutionnels.
  • Les retombées de l’augmentation des dépenses militaires pourraient profiter à d’autres secteurs que la défense, notamment la cybersécurité, l’énergie et les infrastructures. Pour les marchés obligataires européens, la principale réponse à l’augmentation des budgets de défense pourrait être un resserrement des spreads.
  • Un accord de paix entre la Russie et l’Ukraine serait bénéfique pour l’Europe : il réduirait les primes de risque et stimulerait l’euro. Une baisse potentielle des prix de l’énergie profiterait aux entreprises et aux consommateurs.

Trois ans après le début du conflit, le président américain Donald Trump a fait pression pour mettre fin à la guerre et a entamé des pourparlers de paix bilatéraux avec la Russie. Le réchauffement des relations entre les États-Unis et Moscou a d’abord surpris l’Europe, qui a - comme les États-Unis jusqu’à présent - maintenu un soutien fort à l’Ukraine.

La fin du conflit aux portes de l’Union européenne serait bénéfique pour l’économie de l’Union. Toutefois, l’UE pourrait également devoir tracer de plus en plus sa propre voie politique.

Le chancelier allemand désigné, Friedrich Merz, a reconnu cette nouvelle réalité après sa récente victoire électorale, en déclarant que sa priorité était de renforcer l’Europe, étape par étape, afin qu’elle puisse devenir indépendante des États-Unis.

Les dépenses de défense peuvent soutenir la croissance, mais des investissements institutionnels seront nécessaires

Nous pensons que la perspective d’une UE plus audacieuse et plus indépendante entraînera une augmentation des dépenses de défense, ce qui pourrait stimuler la croissance économique.

Depuis la fin de l’année dernière les membres européens de l’OTAN envisagent une série d’options pour faire passer les dépenses de défense de 2 à 3 % du produit intérieur brut (PIB).

L’une des possibilités est un programme d’emprunt commun. Une autre option consisterait à assouplir les règles budgétaires de l’UE pour permettre aux gouvernements d’augmenter les dépenses de défense.

En dehors de l’UE, le Royaume-Uni s’est engagé à porter les dépenses de défense à 2,5 % du revenu national d’ici 2027 en réduisant son budget d’aide.

Une partie du financement devra provenir d’investisseurs institutionnels.

Mais pour cela, il faudra peut-être réviser la législation sur la finance durable afin d’attirer les investisseurs européens, qui sont généralement confrontés à davantage d’exclusions dans leur univers d’investissement que leurs homologues américains. Signe que l’Union européenne est peut-être prête à aider les entreprises, la Commission européenne a proposé d’assouplir la réglementation applicable aux entreprises sur la déclaration de l’impact environnemental de leurs activités, en plus des règles de diligence raisonnable applicables à la chaîne d’approvisionnement.

L’augmentation des dépenses de défense peut contribuer à soutenir la croissance économique, même si elles ont tendance à générer des rendements plus faibles pour les économies à long terme par rapport aux dépenses dans d’autres secteurs. Le PIB pourrait augmenter de 0,9 % à 1,5 % par an si les gouvernements portaient leurs dépenses annuelles de défense à 3,5 % du PIB et passaient à l’achat d’armes fabriquées dans le pays plutôt qu’à celles conçues et principalement fabriquées aux États-Unis, selon l’analyse de l’Institut de Kiel.

Les retombées pourraient profiter à la cybersécurité, à l’énergie et aux infrastructures

L’augmentation des dépenses de défense pourrait stimuler considérablement un large éventail de valeurs européennes dans les années à venir.

Nous nous attendons à un effet domino, de la défense vers d’autres secteurs tels que la cybersécurité, les biens industriels, les réseaux électriques, la production d’électricité et les infrastructures (ces dernières pourraient également bénéficier de la reconstruction potentielle de l’Ukraine). Les petites et moyennes entreprises pourraient en profiter.

En ce qui concerne les obligations, la principale réaction à l’augmentation des budgets de défense pourrait être le resserrement des écarts de rendement entre les obligations des pays périphériques (par exemple, le Portugal, l’Espagne et la Grèce) et celles des pays centraux, à savoir la France et l’Allemagne, car les marchés spéculent sur une intégration budgétaire plus étroite.

Priorité à la croissance et à la déréglementation : une aubaine pour les actions européennes

L’accent étant à nouveau mis sur l’accélération de la croissance économique, la concurrence pourrait s’intensifier au sein de l’Union, ouvrant la voie à la création de "champions nationaux" dans les différents pays. Cette dynamique pourrait également ouvrir des perspectives aux investisseurs des marchés privés.

Mettre la priorité sur la croissance peut également contribuer à relancer la productivité, donnant ainsi à l’Europe la possibilité de rattraper les États-Unis et la Chine à moyen terme. Les niveaux de productivité en Europe et aux États-Unis étaient similaires il y a 20 ans, mais l’écart s’est creusé depuis en faveur des États-Unis. Une amélioration durable de la productivité permettrait aux actions et aux performances européennes de rattraper leurs homologues américains.

Enfin, nous nous attendons à ce que l’accent soit mis plus largement sur la déréglementation. L’administration Trump s’efforçant de réduire la réglementation des entreprises, l’Europe pourrait avoir besoin de réformer certaines règles existantes pour rester compétitive. La réduction des formalités administratives serait positive pour les entreprises et la croissance globale.

Impact sur les marchés d’une trêve potentielle entre la Russie et l’Ukraine :

La fin du conflit entre la Russie et l’Ukraine serait bien accueillie par les décideurs politiques européens et acclamée par les marchés financiers, même si le règlement n’est pas optimal à long terme. Nous voyons quatre principaux impacts possibles d’un accord de paix sur les marchés européens :

  • Stimulation par la baisse des prix de l’énergie : l’UE a largement évité de s’approvisionner en énergie russe depuis le début du conflit et toute reprise des achats de gaz russe contribuerait à faire baisser les prix élevés de l’énergie en Europe, ce qui aiderait les entreprises, en particulier les fabricants et les producteurs de produits chimiques, ainsi que les consommateurs. La menace de M. Trump d’imposer des droits de douane à l’UE si elle n’achète pas davantage de gaz naturel liquéfié (GNL) américain pourrait compliquer la situation. Le GNL américain est plus coûteux que le gaz acheminé par gazoduc.
    Un accord de paix pourrait également ouvrir la voie à un pacte entre les États-Unis, la Russie et l’Arabie saoudite pour réduire les prix mondiaux de l’énergie.
  • Les primes de risque pourraient diminuer sur les marchés européens : une trêve renforcerait la confiance des investisseurs et réduirait la prime de risque d’une éventuelle escalade future. Nous estimons que l’impact d’une trêve sur le marché pourrait se traduire par une hausse de 10 % de l’indice l’EURO STOXX 50 et potentiellement deux fois à trois fois plus pour les marchés d’Europe de l’Est exposés comme la Pologne (bien qu’une partie de la hausse puisse déjà être prise en compte).
  • La hausse des rendements obligataires européens pourrait persister : les récents développements ont renforcé l’hypothèse d’une augmentation des émissions de dette, les pays européens supportant la charge financière d’un accord de paix à long terme. Depuis que la perspective d’une fin des hostilités s’est dessinée après un appel entre M. Trump et le président russe Vladimir Poutine le 11 février, les obligations d’État allemandes et françaises ont toutes deux augmenté.
    Avec l’augmentation des dépenses de défense, nous nous attendons à ce que les rendements plus élevés persistent dans un environnement de volatilité accrue et de découplage des principales courbes de rendement. Un point positif est qu’avec une coopération européenne plus étroite, les écarts entre les obligations souveraines françaises et allemandes pourraient se stabiliser quelque peu. Les perspectives de rendement pourraient changer si la baisse des prix du gaz se concrétisait, donnant à la Banque centrale européenne une plus grande marge de manœuvre pour réduire les taux d’intérêt.
  • L’euro pourrait (partiellement) sortir de l’ombre du dollar américain : le marché des changes s’est focalisé sur le dollar au lendemain de l’élection de M. Trump. Mais la perspective d’un accord de paix, associée à la récente surperformance des actions européennes, a suscité un regain d’optimisme quant à une reprise cyclique européenne et à un changement de politique en Europe. Nous pensons cette évolution des perspectives pourrait entraîner une hausse de l’euro par rapport au franc suisse et réduire la pression baissière sur l’euro par rapport au dollar. Les facteurs de valorisation soutiennent certainement une appréciation de l’euro. Toutefois, la volatilité pourrait augmenter par rapport à l’année dernière, d’autant plus que les perspectives de l’euro pourraient être freinées par la faiblesse structurelle persistante de l’Europe et le risque de nouveaux tarifs douaniers.

Une Europe plus proactive est positive pour les marchés

Même si un accord de paix ne voit pas le jour dans l’immédiat, nous pensons que l’impact durable du changement de politique des États-Unis pourrait être une UE plus proactive, les responsables étant poussés à agir pour revoir les dépenses de défense et d’autres politiques afin d’empêcher le bloc européen de se laisser distancer par les États-Unis et la Chine. Pour les investisseurs, nous pensons que cela ne peut être que positif.

Gregor MA Hirt 3 mars

Tags


Partager

Facebook Facebook Twitter Twitter Viadeo Viadeo LinkedIn LinkedIn

Commentaire
Publicité
Dans la même rubrique
Rubriques