Au début du mois de décembre, le gouverneur de la Bank of England, Mervyn King, s’est attiré les foudres des entrepreneurs après avoir tenu un discours catastrophiste lors de la conférence de presse biannuelle sur la stabilité financière. Ils lui reprochaient d’ajouter à la prophétie auto-réalisatrice qui constitue une part non négligeable de toute crise de confiance.
King appelait notamment les banques à « renforcer leur capital pour faire face à un contexte extrêmement menaçant » et indiquait que la Bank of England préparait elle-même un plan de secours dans l’optique du démembrement de la zone euro.
« Contingency plan ». Ce terme est désormais sur toutes les lèvres.
Le gestionnaire de fonds britannique Schroders a indiqué qu’il scrutait avec encore plus d’attention ses contreparties et ne prenait en collatéral que des obligations d’une liste très réduite d’états en évitant les zone trop sensibles de l’Europe, tout particulièrement les PIIGS (Portugal, Italie, Irlande, Grèce, Espagne).
Le leader mondial du courtage en FX et obligations d'Etat, ICAP, a indiqué qu'il avait testé ses systèmes pour gérer l'éventuel effondrement de l'eurozone et le retour aux monnaies nationales.
« Toutes les sociétés de notre portefeuille disposent désormais d’un plan de secours, confirme Andrew Aylwin, associé du fonds de private equity londonien Lyceum Capital. Le mouvement s’est accéléré ces derniers mois, alors que le premier plan a été formalisé il y a environ six mois. »
A plus grande échelle, le leader mondial du courtage en FX et obligations d’Etat, ICAP, a indiqué qu’il avait testé ses systèmes pour gérer l’éventuel effondrement de l’eurozone et le retour aux monnaies nationales.
Selon Jeremy Bell, avocat d’affaires et associé chez Ashurst à Londres, certaines firmes s’assurent que leurs euros sont dans des comptes bancaires de juridictions de pays forts, plutôt que dans des comptes bancaires de pays faibles de (...)
Dans les grandes banques d’investissement, des équipes spéciales de dix à trente personnes sont entièrement dévolues à la préparation de « kits de sauvetage » adaptés à tous les scénarios consécutifs à un démembrement de la zone euro. Les équipes procèdent à des simulations en temps réel, sur plusieurs jours consécutifs, en veillant autant à la logistique (combien de personnes disponibles immédiatement en cas d’urgence) qu’aux circuits informatiques.
Mais pas de panique, suggère Jeremy Bell, avocat d’affaires chez Ashurst. Selon lui, toutes les firmes sont loin d’en être au stade du plan de secours. Comme près de la moitié des gestionnaires de fonds interrogés par Bank of America - Merrill Lynch dans sa dernière étude mensuelle, il ne croit pas à un démantèlement de l’eurozone. Et enfin, il ne doute pas que les grandes firmes sauront réagir très rapidement si jamais le pire devait se produire.
Le principal risque, pour les firmes de private equity, serait de gérer le risque sur les nouveaux taux de change qui pourraient être introduits.
« Le principal risque, pour les firmes de private equity, serait de gérer le risque sur les nouveaux taux de change qui pourraient être introduits. Elles devront trouver un moyen sûr. Par exemple, si une cible d’investissement est fixée en euros, avec un engagement des investisseurs en euros, il n’y a pas de problème de taux de change. Mais si la cible d’investissement évolue vers une autre monnaie, par exemple la drachme grecque, des soucis apparaitraient. Les gestionnaires pourraient être amenés à consulter au préalable les investisseurs sur la meilleure façon, selon eux, de gérer le risque d’un nouveau taux de change. »
Le process est simple en soi, ce sont les différentes éventualités qui sont difficiles à prévoir, les fameux worst case scenarios. « Dans les plans de secours que nous avons jusqu’à présent élaborés, poursuit Andrew Aylwin, nous avons anticipé sur douze mois, en prévoyant l’ensemble des échéances, des clauses bancaires, etc... Nous suivons l’évolution sur une base mensuelle et nous nous assurons que les bilans sont à l’équilibre pour permettre de continuer d’assurer le financement d’acquisitions. Il s’agit en définitive de continuer de délivrer la meilleure valeur aux clients, avec les meilleures décisions possibles, pour que nos clients souhaitent davantage investir dans nos sociétés.
C’est comme un stress test, nous prévoyons l’inattendu pour être sûr de rester robuste et d’assurer de bonnes performances. »
L’élaboration de ces plans de secours n’est-elle pas en soi un nouveau frein à l’activité de l’industrie financière ? « Le coût principal sera lié au conseil et à l’expertise juridique, estime Jeremy Bell. Mais généralement, je ne vois pas les plans de secours comme des éléments pouvant entraîner une baisse de liquidités pour les activités des fonds. J’espère simplement qu’ils seront simplement en pause le temps que les choses se règlent. Ce ne sera pas bon pour la reprise économique, bien entendu. Mais on peut aussi imaginer que des fonds profitent de ces opportunités pour se positionner de façon à acquérir des actifs sous-évalués. »