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Il n’est pas urgent d’attendre ...

Contrairement à 2020 ou à début 2021 durant lesquels l’ensemble des discours étaient rassurants et volontaires, ce sont donc plutôt des tentatives de dialectique sibyllines, voire des sophismes, que l’on lit ou entend, chacun tentant de prouver qu’il a la situation en main, en n’ayant toutefois que peu de certitude sur les chiffres et les résultats concrets.

Attentisme (Larousse) : "Pratique politique ou syndicale ou attitude individuelle qui consiste à refuser l’initiative et à se déterminer suivant les circonstances."

C’est donc bien ce mot qui nous semble pouvoir définir le positionnement de bien des intervenants financiers et économiques ces dernières semaines… Qu’il s’agisse du pouvoir politique, a fortiori en France ou en Allemagne, deux piliers principaux de l’Eurozone ; du pouvoir monétaire ; de bon nombre d’entreprises et des investisseurs, les discours et publications mixant la plupart du temps un présent et un futur, ni totalement en accord, ni totalement contradictoire, ni surtout décidé…

Ainsi, contrairement à 2020 ou à début 2021 durant lesquels l’ensemble des discours étaient rassurants et volontaires, ce sont donc plutôt des tentatives de dialectique sibyllines, voire des sophismes, que l’on lit ou entend, chacun tentant de prouver qu’il a la situation en main, en n’ayant toutefois que peu de certitude sur les chiffres et les résultats concrets.

Quelques exemples :

François Villeroy de Galhau : « Donc aujourd’hui il n’y a pas de raison par exemple que la Banque centrale européenne augmente ses taux d’intérêt l’an prochain. »

Aujourd’hui, selon les nuages que nous voyons, il n’y a pas de raison non plus qu’il pleuve l’an prochain !

Chuck Schumer, chef Démocrate au Sénat américain, dans le cadre des difficultés à appliquer un plan de relance coûteux et porteur d’inégalités massives, d’inflation forte mais hétérogène : « Personne n’obtiendra tout ce qu’il veut, mais quoi qu’il en soit, notre proposition finale tiendra la promesse fondamentale que nous avons faite. »

Edenred lors de sa publication de ses chiffres du T3 2021, soit seulement 3 mois avant la fin de l’exercice comptable : « L’ebitda 2021 se situera dans la moitié haute de la fourchette fixée en début d’année de 620M€ à 670M€, sous réserve qu’il n’y ait pas de nouvelles restrictions majeures liées à la crise sanitaire. »

Dans ce contexte, si le marché avait légèrement corrigé en septembre, il adopte actuellement une position relativement neutre, y compris sur les marchés de crédit, partie restant traditionnellement la moins risquée d’un portefeuille en absolu.

Et ce sont donc des allers-venues répétés que l’on observe, que ce soit sur les taux ou sur les spreads de crédit, rendant difficile le market timing et favorable le portage de moyen terme, si tant est qu’il soit positif.

Pendant ce temps les liquidités des banques centrales, bien que ces dernières adoptent un discours de façade plus mesuré, continuent d’affluer et la trésorerie s’amoncelle dans les bilans institutionnels ou corporates, balancés entre incertitude à moyen terme, rendement nul à très court terme et nécessité de placement, imposée par la réglementation pour certains, la facturation des dépôts pour d’autres et le risque d’opportunités pour la plupart.

Alors que faire ?

Notons tout d’abord que le comportement des grands investisseurs obligataires, essentiellement sous contraintes drastiques et variées, a significativement changé ces dernières semaines. S’il était poussé vers la prise de risque au premier semestre, avec peu d’acheteurs sur les obligations souveraines (rappelons ici la hausse des taux de mars/avril) et un segment high yield plébiscité, notamment sur le marché primaire qui voyait des books sursouscrits plusieurs fois, on voit aujourd’hui des flux sensiblement différents :

- les primaires high yield parviennent, certes, à se placer mais sans réel engouement ; Iliad a par exemple préféré rehausser son taux plutôt que de risquer l’échec de l’émission, devant la frilosité, certes mesurée, des investisseurs.

- à l’autre bout de la chaîne, les émissions souveraines et assimilées sont massivement souscrites comme en témoigne la demande sur l’émission de l’Union Européenne 2037 d’un montant de 135 milliards d’euros ! Et le label ‘green bond’ n’y était probablement pas pour grand-chose, comme en témoigne la faible demande sur le Bund Green quelques jours plus tard. Ce sont plutôt les quelques points de base complémentaires par rapport à la référence allemande qui ont joué ici, pour un risque finalement moindre car plus diversifié.

Parallèlement à ces mouvements de fond, on observe aussi une complexification des stratégies de gestion, les gérants tentant de continuer sur leur lancée de 2020-2021 en termes de performance, tout en évitant le risque directionnel du marché, considéré comme important par la plupart, que ce soit :

  • En termes de taux à cause de la crainte inflationniste,
  • Ou en termes de crédit en raison 1/des spreads revenus sur des points bas, en moyenne, 2/de la pression sur les coûts (salaires, matières premières) 3/et de l’incertitude sur la pérennité de la situation sanitaire qui a déçu plus d’une fois dans les mois passés.

Nous en citerons seulement deux que nous avons observés récemment :

- Fonds court terme captant la prime du risque systémique au détriment de la prime classique de crédit en acquérant des obligations longues à faible spread (souverains, covered bonds, …) couvertes du risque de taux par des dérivés (mais les taux ne sont-ils pas liés au crédit souverain in fine ?)

- Produits structurés de plus en plus complexes ou indexés sur des paniers de plus en plus larges.

De notre côté, si nous avons pratiqué quelques pair trades sur les obligations souveraines, expliqués dans l’hebdo du 08/10/2021, nous considérons que les moyennes sont trompeuses dans le contexte actuel qui a significativement élargi les extrêmes. Certes les rendements sont plus bas et notre positionnement s’en est ressenti avec une dé-pondération du high yield long sur les portefeuilles flexibles par exemple et un retour très progressif sur les obligations d’Etat, mais il reste tout à fait possible de préserver des rendements positifs sur un portefeuille d’obligations corporates suffisamment diversifié, et le mouvement d’écartement généralisé ‘taux + crédit’ d’octobre était justement une opportunité pour initier quelques nouvelles lignes.

N’oublions pas non plus que les liquidités dans le système financier sont quasiment deux fois plus importantes qu’elles ne l’étaient pré-crise de la Covid19 et elles poursuivent leur augmentation, que ce soit aux USA ou en Europe. La dette ayant elle augmenté de 30% environ, il est techniquement logique que les prix des obligations soient plus élevés que ceux de 2019 à moyen terme, hors modification substantielle de la politique monétaire, ce qui est loin d’être le cas en Europe, puisqu’on table sur une politique accommodante pour encore 3 à 4 ans minimum, en l’absence de nouvelle crise… Actuellement les obligations d’Etat sont plutôt moins chères qu’en 2019 (Bund 10 ans à -0.10% contre -0.21% fin 2019) et les spreads de crédit corporates sont plus larges que fin 2019 également (250bps pour le crossover contre 210bps fin 2019). Il n’y a donc pas d’aberration dans les niveaux obligataires et crédit actuels et il est préférable de capter le portage plutôt que d’attendre des hausses significatives de taux ou de spread, que la BCE réprimera de peur du risque de contagion systémique, vu les masses désormais mises en jeu…

Matthieu Bailly Octobre 2021

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