Ce fut l’une des conclusions révélées cette année par l’étude d’Union Investment, coordonnée par les professeurs Daniel Rösch et Philipp Sibbertsen de l’Université de Hanovre. L’enquête portait sur l’utilisation des modèles de risque, entre autres, auprès de 106 investisseurs institutionnels.
85 pour cent des investisseurs institutionnels estiment que les modèles de risque sont encore importants. Seulement 15 pour cent d’entre eux ont donné des réponses allant du scepticisme au rejet pur et simple au sujet des avantages liés à l’utilisation des modèles statistiques pour mesurer le risque. Cette opinion positive se reflète également dans les réponses des investisseurs à la question de savoir quel rôle jouent ces modèles dans leurs propres entreprises. 76 pour cent des personnes interrogées ont affirmé que l’utilisation de modèles mathématiques de risques était très importante ou extrêmement importante dans leurs processus de décision. « Les évènements de ces dernières années et l’accent mis par conséquent sur la sécurité des investissements ont évidemment rendu les investisseurs plus conscients de la nécessité d’identifier et de mesurer les risques », explique Alexander Schindler, membre du conseil d’Union Investment, en charge des relations avec les clients institutionnels.
Les modèles de risque ne sont pas très largement utilisés pour les classes d’actifs alternatifs
Les modèles de risque sont principalement appliqués aux classes d’actifs traditionnelles. Ils sont le plus couramment utilisés pour les obligations et autres titres à revenu fixe, à hauteur de 73 pour cent des investisseurs, à l’aide de modèles de risque pour cette classe d’actifs, suivie par les actions (57 pour cent) et les instruments du marché monétaire (40 pour cent). Ces modèles sont relativement rarement appliqués aux ABS « Asset-Backed Securities » (13 pour cent), le « private equity » (12 pour cent) et les « hedge funds » (4 pour cent). « Ce résultat n’est pas particulièrement surprenant et peut être attribué en grande partie à la complexité liée aux modèles cartographiant ces classes d’actifs », déclare le professeur Rösch, l’un des auteurs de l’étude.
La grande majorité des investisseurs (90 pour cent) a déclaré que les modèles de risque ont joué un rôle clé dans la cartographie des effets de diversification. Toutefois, seulement 38 pour cent des personnes interrogées, utilisent des modèles de risque pour prévoir les corrélations. D’autre part, les modèles mathématiques sont le plus souvent utilisés par les clients institutionnels, afin de prévoir les indicateurs de risque clés (61 pour cent des répondants), suivis par ceux relatifs aux volatilités (59 pour cent) et au rendement des investissements (57 pour cent). Schindler s’inquiète du fait que seulement un tiers d’investisseurs, utilisent des modèles de prévisions de corrélation.
Le climat actuel du marché rend plus que jamais nécessaire la diversification pour les portefeuilles des investisseurs. Cela signifie que l'évaluation systématique des effets de corrélation est d’une importance accrue.Alexander Schindler, membre du conseil d’Union Investment
Les modèles doivent être améliorés
Plus des trois quarts des investisseurs interrogés estimaient que la sophistication des modèles de risque qu’ils utilisent, a été assez satisfaisante voire très satisfaisante, tandis que le quart des répondants ont admis que leurs modèles devaient être améliorés. D’ailleurs, 6 pour cent des personnes interrogées ont classé la sophistication de leurs modèles comme insuffisante ou très insuffisante. Près des deux tiers des modèles sont développés en interne - quoique largement en faisant appel à une aide extérieure - alors que près d’un tiers des modèles ont été développés principalement ou totalement par des experts extérieurs.
La qualité des données est essentielle
L’étude sur la gestion des risques a également analysé les avantages des modèles de risque. L’un des défis, actuellement identifié, est lié à l’étalonnage et aux estimations statistiques économétriques des modèles existants. Alors qu’il est relativement facile de construire des modèles de risque concernant des classes d’actifs pour lesquels il existe des données empiriques suffisantes, cela est en revanche problématique pour les marchés qui ont peu ou pas de données historiques disponibles. Selon l’étude, les paramètres pertinents ne peuvent souvent être estimés que de manière statistique, sur la base d’hypothèses simplifiées et en acceptant un degré élevé d’incertitude relatives aux estimations, ce qui peut induire une prévision du risque inexacte. « La qualité et la quantité des données sont des facteurs clés dans l’étalonnage empirique et les estimations statistiques des modèles – ce que les praticiens doivent garder à l’esprit », souligne le professeur Rösch.
Reconfigurer les modèles pour relever de nouveaux défis
L’utilisation de données historiques a également été examinée de façon critique. C’est parce que les modèles reposant uniquement sur des données historiques, cartographient uniquement les évènements qui se sont déjà produits dans le passé. Ils ne tiennent pas suffisamment compte des évènements extrêmement rares (appelés « black swans »). Cependant, les auteurs de cette étude estiment que ce défi peut être surmonté si les modèles économétriques existants sont élargis pour inclure d’autres techniques telles que l’analyse du risque de modèle et le « stress-testing ».
La nature unidimensionnelle de la plupart des modèles de risque pose un autre défi, car ce sont des modèles partiels qui habituellement analysent seulement des catégories de risque individuels et des facteurs de risque.
« Les crises de ces dernières années ont, cependant, montré que les risques sont interdépendants et se renforcent mutuellement », souligne le professeur Rösch. « Les interdépendances entre les différents types de risques et les facteurs de risque ainsi que leur mesure susciteront donc à l’avenir, de plus en plus d’intérêt. »
« Une réglementation plus stricte sera également un facteur important dans le cas présent », note Alexander Schindler. « Le défi crucial est non seulement d’analyser les risques individuels, de manière isolée, mais de les comprendre et de les évaluer dans un cadre plus large » conclut-il.