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Poursuite de l’embellie sur les marchés : Merci la BCE !

Depuis le mois de novembre, la BCE de Mario Draghi a donné le point de départ du retour des investisseurs sur les actifs risqués. En premier lieu sur les actions et les obligations à haut rendement, puis sur les emprunts des zones à risque (Italie, Espagne) et à l’intérieur de ces compartiments, sur les valeurs ou zones qui ont le plus souffert en 2011 (France, Italie, Espagne, Allemagne et les valeurs financières, valeurs cycliques, valeurs endettées).

Progressivement la BCE a été le chef d’orchestre d’un changement radical d’attitude et de la mise en place d’une politique de quantitative easing. Première étape : baisse à 2 reprises des taux courts. Deuxième étape : mise en place de 2 plans de financement des banques (2 x 500 Milliards d’Euros), les fameux LTRO où l’on prête aux banques à 1% pour une durée de 3 ans. La deuxième étape est la plus importante car elle a permis, d’une part, d’éviter le « crédit crunch » tant redouté et ses conséquences sur l’économie globale, et d’autre part, elle a favorisé la détente des taux de l’Espagne et de l’Italie qui avaient des graves difficultés à se financer. Notons toutefois le caractère pervers de cette mesure où l’on prête aux banques, afin qu’elles achètent de la dette de leur pays (qui est en difficulté), mais dont les bilans sont déjà « trop » chargés des créances de ces mêmes pays !

Le LTRO, des avantages multiples
Dans un premier temps l’avantage est multiple. Il permet de donner la possibilité aux Etats de se financer. Il permet aussi d’endiguer une spéculation destructrice du marché interbancaire et redonner de la confiance, en mettant à disposition des banques les liquidités empruntées à 1 %, réinvesties ensuite à un taux plus élevé. Ainsi, le secteur financier enregistre un gain de portage.
En dernier lieu, cela soulage le bilan des banques et des assureurs car les taux des dettes publiques diminuent et les actifs s’apprécient en capital, permettant alors de compenser une partie des pertes latentes de fin 2011 (Italie, Espagne…). On imagine bien que les assureurs sont grandement soulagés dans la gestion de leurs fonds Euro !

Une décote non négligeable en contrepartie
La contrepartie de cet argent « facile » est très certainement trouvée dans le taux de participation des banques et assureurs (88,5%) au plan de restructuration de la dette grecque. Ainsi 172 milliards d’Euros ont été apportés pour un total d’engagement des créanciers près de 187 milliards d’Euros. Ce taux de participation volontaire élevé déclenche les clauses d’actions collectives et donc au final, 197 milliards de dettes seront échangés contre des nouveaux emprunts. La participation des créanciers privés souhaitée par Angela Merkel depuis 14 mois se traduit donc par une perte de 50% en valeur faciale et de 75% environ en valeur actualisée !

Ceci étant acquis les Etats ont accepté le versement du 2ème plan d’aide, soit 130 milliards d’Euros de l’UE, qui devraient permettre ainsi à la dette grecque d’atteindre 120% du PIB en 2020 (sous réserve d’une normalisation des finances publiques grecques). La boucle est bouclée ; la BCE a enfin donné du temps au temps et l’Europe peut se concentrer maintenant sur les questions essentielles qui vont dominer en 2012, à savoir la réduction des dépenses publiques, les mesures en faveur de la croissance économique et le retour à la compétitivité de certains états.

Plus de visibilité macroéconomique à l’échelle globale
Dans le même temps, les signaux économiques pour le reste du monde sont positifs :
L’économie américaine entre progressivement dans une tendance de croissance de 2,5% à 3%, grâce à l’arrêt de la dégradation du marché de l’immobilier et à l’amélioration constante des chiffres de l’emploi. Les chiffres de ventes de maisons existantes se redressent et retrouvent leur niveau de septembre 2007. Les stocks de maisons neuves eux aussi rejoignent leur niveau de 2006. Même s’ils font face à des défis tout aussi importants qu’en Europe avec la question de la dette publique et de l’emploi, les Etats-Unis semblent mieux armés pour générer de la croissance cette année. Les économies émergentes continuent d’enregistrer des taux de croissance appréciables, même si certains pourraient s’inquiéter d’une baisse trop sensible. Avec 7.5% de croissance, la Chine peut faire douter mais les banques centrales des pays émergents sont efficaces et ont déjà commencé leur politique de baisse des taux, pour compenser la baisse de la croissance : Au Brésil, baisse de 75 bp à 9,75% du Selic ; en Chine, baisse de 50 bp du taux de réserve obligatoire à 20,5% ; en Australie, baisse de 25 bp à 4,25% en décembre.
Enfin la conjoncture européenne se stabilise et la récession profonde n’est plus d’actualité. En Janvier, l’indice PMI de l’activité manufacturière de la zone Euro atteint 48.8 contre 46.9 en Décembre ; certes toujours dans une zone de contraction de l’activité mais loin des 42 atteint en 2008/2009. La question majeure pour l’Europe et en particulier de l’Europe du Sud et de la France, sera de retrouver le chemin d’une croissance durable en abaissant le taux de chômage. La rigidité des systèmes sociaux, la peur de perdre des acquis seront des freins à toute réforme souple et rapidement efficace.

Allocation d’actifs : les marchés d’actions européens encore sous-valorisés
Le contexte actuel moins risqué nous invite à poursuivre notre action de réallocation des actifs cash sans rentabilité, vers les actifs risqués tels que les actions et les obligations d’entreprises.
L’afflux de liquidités sur des marchés actions encore sous-évalués, devrait permettre encore aux indices de progresser pour valoriser des entreprises qui sont en bonne santé (peu de stock, marges opérationnelles à un niveau élevé, rentabilité financière élevée et taux de défaillance historiquement faibles). L’optimisme actuel ne doit pas empêcher d’analyser les risques qui subsistent ou apparaissent :
- Le risque géopolitique iranien et l’envolée des prix du pétrole : au-delà de la tension diplomatique, la hausse des cours de l’énergie devient handicapante pour les ménages et les entreprises (Cf Compagnies Aériennes, Air France). Le coût de l’énergie aura un impact sur les résultats des entreprises en particulier sur celles ne pouvant pratiquer de hausse de prix ; les résultats du 1er trimestre 2012 seront un baromètre important pour la capacité bénéficiaire des entreprises.
- Le risque d’inflation avec la montée des prix de l’énergie et l’afflux de liquidités orchestré par l’ensemble des banques centrales du Monde : la planche à billet tourne dans toutes les zones de la planète (les actifs sans risques : taux à 10 ans US (2%) et Allemands (1.80%) ne vont-ils pas perdre de leur superbe ?).
- La dissension politique en Europe et le retour des dettes de la zone Euro avec le cas français comme problème central. Les choix du prochain gouvernement seront déterminants pour l’avenir de la France et son poids au sein de l’Europe. La trajectoire de la dette publique française n’est pas tenable sans réforme du système publique devenu hélas trop coûteux et peu productif. Les hausses d’impôt sans mesures d’aides à la création de richesse découragent, favorisent la désindustrialisation, la destruction d’une main d’œuvre qualifiée (alors que la main d’œuvre française est une des plus productives ramenée à une base, horaire comparable) et réduisent la compétitivité de la France à l’échelle internationale.

Tandis que les pays voisins sont en train de se réformer (Irlande, Portugal, Italie, pragmatisme des systèmes éducatifs hollandais ou finlandais...), la France pourrait se trouver paradoxalement seule à refuser toute mutation, si ce n’est la hausse de la fiscalité. C’est en ce sens que l’élection présidentielle française est à surveiller au cours des prochains mois. Gageons que les risques évoqués ne viennent pas perturber le bon déroulement de l’année 2012 et que les actionnaires tant décriés, puissent enfin voir leur patience et leur prise de risque récompensées !

Christophe Brulé Mars 2012

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