Après S&P le 13 janvier, Moody’s a donc abaissé sa note à Aa3 comme attendu mais dans un timing qui l’était moins (la perspective était négative depuis février). L’Outlook est négatif comme il le demeure pour l’Allemagne, les Pays-bas et l’Autriche. Fitch est négatif également et devrait rendre sa décision courant 2013 (avec une chance sur 2 de maintien du AAA évoqué début novembre).
Sans revenir sur le rationnel de la décision, il faudra surveiller les éléments mis en avant qui pourraient de provoquer un downgrade supplémentaire par Moody’s à savoir la possibilité d’une dégradation de la situation macroéconomique ou l’incapacité à mener à bien les réformes.
L’Outlook repasserait à Stable inversement en cas de mise en place des réformes économiques et fiscales renforçant les perspectives de croissance et les finances publiques. Moody’s ne considère pas un upgrade pour le moment à moyen terme mais cela viendrait en cas d’amélioration significative des finances publiques accompagnée d’un retournement à la baisse de la dette/PIB.
En ce qui concerne les taux :
Le niveau actuel ne devrait pas beaucoup se dégrader. Nous anticipons pour le spread OAT-Bund 10ans toujours un range entre 60 et 80pbs. Les niveaux actuels semblent donc relativement bien pricés à nos yeux.
Le spread est en effet 3 fois supérieur à celui des Pays Bas (toujours Aaa mais Outlook neg) et les OAT sont à moins de 20pbs des niveaux du 10 ans de la Belgique qui est pourtant 2 notes en dessous (Aa3) et n’offre pas la même liquidité….
Les alternatives aux OATs offrant qualité de dette, liquidité comparable et suppléments de rendements ne sont en effet pas légions. A moins que l’ESM ne se positionne comme un nouveau Souverain AAA qui pourrait attirer des acheteurs au détriment des OAT… mais ce n’est pas pour demain.
Les ventes forcées pourraient jouer également. Un certain nombre pourrait pour les investisseurs ne pouvant investir qu’uniquement sur du AAA (ce qui ne posait pas de problème jusque là, la France étant toujours AAA chez 2 agences sur 3). En fait la grande majorité des participants ne semble pas tenue par cela entre ceux qui sont benchmarkés France, ceux qui doivent uniquement investir en Investment Grade (ex de la BNS qui est investie à 86% en AAA mais dont la règle est d’investir dans des titres en moyenne IG de même que pour la plupart des assureurs) ou AA+/Aa1.
Chez EuroMTs par exemple, la France ne sortira pas de l’indice EuroMTS AAA (MTS Highest Rated Government Bond index). Finalement la France bénéficie de la taille de sa dette et de l’encours de ses papiers. Difficile de ne pas investir sur des OATs qui restent parmi les mieux notés et incontestablement parmi les plus liquides. Mais cela ne suffit pas comme l’a montré le cas des BTPs italiens, liquides mais néanmoins délaissés par beaucoup d’investisseurs institutionnels. C’est aussi que, fondamentalement la situation pour l’instant n’inquiète pas outre mesure (GDP Q3 +0.2%, refinancement bouclé, déficit en ligne, majorité politique stable etc).
Globalement, c’est une fois encore, plutôt les spreads qui guideront les investisseurs (et les agences ?). Ce n’est qu’en cas de forte tension de ceux-ci que les investisseurs changeront leur allocation. Sur ces niveaux, il n’y a pas de raison de craindre des ventes forcées autres que marginales.
Côté supply non plus pas de tension à attendre. Le programme 2012 est bouclé avec un taux moyen qui n’a jamais été aussi bas à 1.88% et les émissions restantes vont permettre d’accentuer le programme de rachats de titres 2013 et surtout 2014 (déjà plus de 20mds rachetés).
Au final une décision sans grande conséquence sur les niveaux des spreads qui intégraient déjà un positionnement plus risqué que celui de l’Allemagne depuis un moment. Si Fitch pourrait s’aligner sur les 2 autres agences, nous n’anticipons pas de mouvement supplémentaire de Moody’s ou de S&P pour le moment sur la France (d’autres pays actuellement AAA devraient néanmoins suivre).