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Dépôts des banques auprès de la BCE

Selon Matthieu Grouès, Responsable de la gestion collective et institutionnelle de Lazard Frères Gestion, la hausse continue des dépôts à la BCE ne prouve en rien que les banques ne l’aient pas utilisé pour financer l’économie ou acheter des dettes souveraines…

La hausse continue des dépôts des banques auprès de la Banque Centrale Européenne (BCE) a été un sujet constant de débats et de discussions entre investisseurs et intervenants de marché.

Au travers de cette note, nous tentons d’expliquer pourquoi il est naturel de voir les banques déposer chaque jour davantage à la BCE alors que celle-ci augmente ses prêts au secteur bancaire par l’intermédiaire de la facilité de prêt principale (dite MRO ou « Main Refinancing Operations ») ou de la facilité de prêt à long terme (LTRO ou « Long Term Refinancing Operations »).

Lorsqu’un établissement bancaire emprunte à la BCE, l’usage des fonds reçus importe finalement peu : que cette banque prête, investisse sur les marchés ou garde les fonds sur son bilan, in fine, la somme empruntée se retrouvera en dépôt à la BCE le soir même. Sauf exception, les banques emprunteuses et prêteuses à la BCE ne sont tout simplement pas les mêmes.

Le retour automatique de cet argent le soir à la BCE ne prouve en rien que les banques ne l’aient pas utilisé pour financer l'économie ou acheter des dettes souveraines.
Matthieu Grouès

Prenons le cas d’une banque A disposant d’un excédent de liquidité de 100. Si elle achète pour 100 de titres (emprunt d’Etat, obligation d’entreprise ou bancaire), elle créditera le compte bancaire du vendeur du titre de 100. Les liquidités de A auront diminué de 100 mais celles de la banque B du vendeur auront augmenté de 100. Les liquidités excédentaires globales n’auront donc pas été affectées, elles auront juste été transférées pour partie de la banque A à la banque B. Le montant redéposé le soir à la BCE n’est donc pas affecté. De manière identique, si la banque B réinvestit ces liquidités sur les marchés financiers, elle créditera in fine le compte d’un client d’une autre banque, qui elle-même se retrouvera excédentaire en liquidités.

Si la banque A décide plutôt de prêter les 100 à un client, elle créditera le compte de ce client de 100. Si le client ne fait rien, la liquidité de la banque elle-même n’est pas affectée. S’il décide d’investir ces 100 en achetant par exemple une machine, la somme sera transférée sur le compte bancaire du vendeur de machines. L’excédent de liquidités de la banque A aura diminué de 100, mais celui de la banque du vendeur aura augmenté de 100. Là encore le montant global d’excédent de liquidité restera inchangé.

Le retour automatique de cet argent le soir à la BCE ne prouve en rien que les banques ne l’aient pas utilisé pour financer l’économie ou acheter des dettes souveraines.

Par ailleurs, il est également erroné de dire que le système bancaire européen mène aujourd’hui une politique destructrice de valeur en empruntant à 1% à la BCE pour replacer à 0,25% sur les comptes de cette même BCE.

Reprenons le cas où la banque A a emprunté 100 à la BCE pour acheter un titre d’Etat périphérique rapportant par hypothèse 4%. En parallèle, un investisseur a cédé à cette banque A un titre rémunéré à 4% et a placé les 100 reçus en échange sur son compte auprès de la banque B. Cette opération est clairement gagnante en termes de portage pour la banque A. La banque B de son côté dispose de 100 de liquidités, laissées sur son compte par son client et donc a priori non rémunérées, qu’elle place à la BCE à 0,25%. L’opération est donc également gagnante pour la banque B.
On peut noter que l’opération est également gagnante pour la BCE qui prête à 1% et emprunte à 0.25%.
En fait, c’est l’investisseur, qui était porteur d’un titre à 4% et qui l’a cédé pour être en cash sur son compte, qui est perdant en termes de portage.

Pour savoir si les banques ont bien acheté des dettes d'Etats périphériques, il faudra attendre la publication des bilans bancaires à la fin du premier trimestre, mais la forte détente des taux italiens et espagnols depuis un mois est un signe positif.
Matthieu Grouès

Pour être complet, il faut cependant noter que si la banque A a clairement gagné en portage et si l’investisseur a clairement perdu, le risque de défaut a dans l’opération été transféré du second au premier. Pour juger du bien-fondé des décisions de chacun, reste à savoir quelle probabilité on accorde au risque de défaut de l’Etat en question...

Pour savoir si les banques ont bien acheté des dettes d’Etats périphériques, il faudra attendre la publication des bilans bancaires à la fin du premier trimestre, mais la forte détente des taux italiens et espagnols depuis un mois est un signe positif.

Matthieu Grouès Janvier 2012

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