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Du rôle social des Hedge Funds

Activistes, interventionnistes, les hedge funds sont souvent perçus comme des fossoyeurs du capitalisme, quel est véritablement le rôle des hedge funds ?

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Beaucoup de gens, ne travaillant pas dans le milieu de la Finance, n’ont probablement jamais entendu parler des Mutual Funds, par opposition aux Hedge Funds. La raison principale est que les Hedge Funds sont souvent cités par les hommes politiques, ces derniers mettant souvent en exergue leur méconnaissance du sujet. Ce qui distingue les Hedge Funds des fonds « standards », les Mutual Funds, c’est le degré de régulation. Du fait que les Hedge Funds ne soient pas distribués à des petits épargnants, mais plutôt à des personnes très riches, ils ne sont pas sujets à la régulation standard des fonds. Nul besoin de protéger les riches ! Cependant, ceci leur permet de mettre en œuvre des stratégies d’investissement plus agressives, via des ventes à découvert et un effet de levier accru. Cela dit, ce qui pose surtout problème aux hommes politiques c’est ce que l’on appelle l’activisme des Hedge Funds, c’est-à-dire le fait que ces derniers prennent le « pouvoir » dans des entreprises afin d’imposer leurs choix stratégiques, supposés de court terme. Or, un récent article de recherche s’intéresse justement à la question et les résultats semblent contredire les débits de certaines personnalités soi-disant bien-pensantes.

L’étude, de nature pluriannuelle, examine les interventions et remèdes stratégiques, opérationnels et financiers que les Hedge Funds mettent en œuvre envers les entreprises ciblées. Afin d’analyser l’impact positif ou négatif de l’activisme les auteurs procèdent à ce que l’on appelle des études événementielles. Ces dernières consistent à analyser les variations positives ou négatives des cours boursiers autour d’événements spécifiques. A cet égard, l’article indique que le marché réagit en général d’une manière positive lorsque les Hedge Funds mettent en place leurs stratégies d’activisme. L’accroissement du taux de rendement des actions de l’entreprise-cible durant les périodes précédant et succédant l’annonce d’une prise de position accrue dans le capital de l’entreprise cible serait en moyenne de 7% et cette rentabilité persisterait au cours de l’année suivant l’intervention. Ceci irait de pair avec la quasi-systématique amélioration de la performance de la cible, contrairement à ce que l’on observe lors de telles actions de la part d’investisseurs institutionnels tels les fonds d’investissement traditionnels et les fonds de pension. Ceci serait justement dû au moindre de degré de régulation auxquels les Hedge Funds font face et ceci leur permettrait de mettre en œuvre des politiques activistes plus efficaces.

Ce qui est intéressant au plus haut degré, du moins d’un point de vue social, c’est que ces fonds semblent jouer un véritable rôle de répartition des revenus. Ainsi, au cours de l’année qui suit leurs interventions, le revenu des PDG des entreprises-cibles diminuerait en moyenne d’un million de dollars. Eh bien oui, ce que les hommes politiques n’arrivent pas à faire, c’est-à-dire limiter les salaires et la mauvaise gestion des dirigeants, les Hedge Funds le font ! Leurs interventions seraient couronnées de succès dans deux tiers des cas, alors que les parts qu’ils détiennent sont assez limitées. Dans 40% des cas, le succès serait total dans le sens où les principaux objectifs visés ont été atteints, alors qu’il le serait partiellement dans un quart des cas, dans lesquels ont été obtenues des concessions majeures de la part des cibles. En ce qui concerne le pourcentage des parts détenues dans l’entreprise-cible, pour la majorité des cas il varie entre 5,4 et 8,8%. Ceci semble confirmer l’hypothèse que les Hedge Funds ne cherchent pas à prendre le contrôle en soi, mais visent plutôt à inciter les entreprises à mettre en place des politiques d’accroissement de leur valeur de marché.

Quels types d’entreprises les Hedge Funds ciblent-ils ? Tout d’abord, il s’agit surtout d’entreprises du type value, c’est-à-dire des entreprises dont la valeur comptable des fonds propres est supérieure à leur valeur de marché. Ces entreprises seraient dès lors sous-évaluées, notamment pour des raisons managériales. En effet, les entreprises en question ne semblent point souffrir de problèmes opérationnels et semblent profitables au premier abord. Cela dit, ceci n’implique pas que les gestionnaires maximisent la création de valeur. Les problèmes auxquels ces entreprises font face relèvent de la gouvernance et du contrôle des gestionnaires. Ainsi, les entreprises ciblées distribuent en général un dividende faible par rapport à la moyenne du marché, et ceci malgré la profitabilité. En outre, les entreprises seraient-elles trop diversifiées ce qui semble indiquer des tentatives de « empire building » de la part des managers. Des améliorations de la gouvernance suite à l’activisme des Hedge Funds permettraient alors d’accroître la valeur des entreprises.

Pourquoi les Hedge Funds seraient plus efficaces dans leur activisme que les fonds standards. Tout d’abord, les gestionnaires des Hedge Funds sont financièrement plus incités à accroître la valeur des actifs de leur portefeuille puisque leur rémunération comprend souvent une performance fee, c’est-à-dire une rémunération de 20% sur le rendement annuel excédant un certain seuil prédéfini. Les gestionnaires de Mutual Funds quant à eux ne sont rémunérés qu’en fonction des actifs sous gestion, c’est-à-dire touchent des Management fees. Ils seraient en outre plus flexibles dans la mise en œuvre de leur politique d’investissement du fait qu’ils ne se heurtent point à de quelconques contraintes réglementaires et politiques du genre : normes comptables à respecter, limitation du degré de diversification du portefeuille ou limitation de la rédemption des parts. Ceci leur permet de se concentrer sur quelques entreprises cibles.

Du fait de cette liberté du champ d’action, les Hedge Funds semblent agir comme un véritable vecteur de la gouvernance d’entreprise. Ainsi, leur simple présence et leur potentiel d’intervention semblent exercer une forte pression disciplinaire sur les gestionnaires des entreprises dans le sens où ceux-ci sont contraints de donner la priorité au patrimoine des actionnaires. Or, toujours est-il que le transfert de valeur vers les actionnaires ne s’effectue pas aux dépens des créditeurs. L’effet de l’activisme se situe entre la surveillance interne par des actionnaires majoritaires et le monitoring externe par les fameux corporate raiders.

Michel Verlaine Avril 2008

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