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Marchés financiers : faire la différence entre les bulles dangereuses et celles utiles

Les bulles d’actifs financiers se développent généralement dans des contextes de consensus et d’unanimisme sur certaines tendances de marché. Il est unanimement admis que les bulles sont dangereuses. Mais, en fait, les choses sont souvent moins triviales et à côté des bulles dangereuses, il existe des bulles tolérables.

Nous évoquions ce sujet dans un papier publié cette année à l’occasion du lancement du contrat à terme sur la dette française

« La plupart des hommes politiques abordent malheureusement ce sujet de manière simpliste et démagogique. Ils ont certes comme excuse de ne pas comprendre l’utilité et le fonctionnement des marchés financiers, l’excuse aussi de n’avoir jamais véritablement travaillé dans le secteur privé et donc de comprendre les contraintes qui pèsent sur les atteintes d’objectifs de résultats bruts d’exploitation. Mais compte tenu de leurs ambitions, de leurs responsabilités et missions, ils n’ont pas d’excuse lorsqu’ils travestissent la réalité auprès des citoyens »

Mais le fond du problème, c’est que ces dirigeants politiques n’ont ni clients, ni fournisseurs, ni actionnaires mais seulement des électeurs à conserver ou à conquérir en dépensant et gaspillant l’argent qu’ils n’ont pas et là est l’explication principale de leur inefficacité.

QUE SIGNIFIE DONC LA NOTION DE BULLES D’ACTIFS FINANCIERS

Les bulles d’actifs financiers se développent généralement dans des contextes de consensus et d’unanimisme quant à certaines tendances de marché. Ce sont des périodes ou l’on se pose peu de questions et ou l’état présent des marchés financiers et de l’environnement macroéconomique est considéré comme éternel.

Il serait intéressant de pouvoir disposer d’un indicateur permettant de mesurer la pensée unique et l’unanimisme sur des tendances de marchés et de backtester s’il est pertinent pour déceler des retournements de marché ou éclatements de « bulles ». En tout cas, les bulles se sont surtout développées dans des environnements de politiques monétaires incontrôlées. Les quantitative easing des banques centrales OCDE (monétisation directe ou indirecte) ont créé de la liquidité en finançant les dettes publiques mais aussi ce que l’on appelle les actifs dits risqués au rang desquels les actifs émergents (devises, taux et equities) et les matières premières.

Nous vivons donc depuis 15 ans dans une économie de bulles d’actifs financiers. Lorsqu’une bulle éclate sur un actif, l’on assiste généralement à la naissance d’une nouvelle bulle sur un autre actif
Mory Doré

Nous vivons donc depuis 15 ans dans une économie de bulles d’actifs financiers. Lorsqu’une bulle éclate sur un actif, l’on assiste généralement à la naissance d’une nouvelle bulle sur un autre actif car la liquidité abondamment créée par les banques centrales ne peut, en général, être reprise sous peine de provoquer d’énormes chocs patrimoniaux chez les agents privés ou systémiques chez les banques. On a là une forme d’aléa moral qui fait que certains acteurs financiers ne sont pas assez rigoureux dans l’analyse du risque de leurs investissements s’appuyant sur cette idée qu’ils ont une capacité de nuisance systémique et qu’en conséquence il y aura toujours un prêteur/sauveur en dernier ressort.

Sortons de la pensée unique quant aux missions d’une banque centrale, en effet l’inefficacité des actions traditionnelles de politique monétaire est aujourd’hui prouvée

Il faut alors reconnaître que les actions des banques centrales, qu’il s’agisse de mesures conventionnelles ou non conventionnelles de politique monétaire, ne servent plus à rien dans l’environnement économique et financier d’aujourd’hui. Au contraire, elles peuvent rendre les sorties de crise difficiles pour ne pas dire explosives. Qu’on en juge

- 1. La monétisation des dettes publiques par les banques centrales est perverse.
Si les agents économiques du pays continuent d’accumuler la monnaie créée pour monétiser la dette publique sans la rejeter, la monétisation peut être éternelle. Ceci est clairement la dynamique qui a été observée au Japon. Les ménages détiennent des actifs monétaires représentant 170% du PIB, que les banques et investisseurs transforment en détention de titres publics. On se retrouve dans une situation ubuesque : si les bulles sur les prix des actifs risqués éclatent en raison de mauvaises nouvelles macroéconomiques, il sera d’autant plus facile de financer les déficits publics puisque l’excès de liquidité sera utilisé pour financer les dettes publiques. On est clairement ici dans une forme de répression financière.

- 2. Les banques centrales ne créent pas de la monnaie uniquement pour financer les dettes publiques des états budgétairement fragiles. _ Elles créent aussi de la monnaie pour refinancer les banques via des opérations de refinancement extraordinaires (cf les fameux LTRO de la BCE pour long term refinancing operations). Les autorités monétaires se défendent de mener des opérations laxistes en matière de politique monétaire puisqu’elles mettent en avant deux arguments (qui ne résistent malheureusement pas à l’épreuve des faits)

  • D’abord on se rassure sur la bonne gestion des autorités puisque la liquidité allouée aux banques l’est en échange de collatéral. Le problème est que le collatéral accepté – aussi bien créances commerciales qu’actifs financiers – est de qualité de crédit de plus en plus médiocre, ce qui fragilise le bilan des banques centrales.
  • Ensuite, les autorités monétaires (notamment la BCE) cherchent à rassurer sur leur rigueur et leur orthodoxie puisqu’il est admis que ces opérations de création monétaire sont généralement stérilisées, donc neutres sur la croissance de la masse monétaire et donc supposées non inflationnistes. Or là aussi il y a problème puisqu’il est techniquement très compliqué de stériliser la croissance de la masse monétaire.

En tout cas ces opérations de LTRO auront montré la gestion peu rationnelle d’un point de vue économique de la liquidité par les banques.
Souvenons-nous que les dépôts à 24 heures des banques de la zone Euro auprès de la banque centrale avaient atteint un record à 820 Mds€ en mars 2012 (à comparer aux montants de LTRO alloués aux banques : 489 Mds€ en décembre 2011 et 529 Mds€ en février 2012) Au total, ce que l’on retient c’est qu’une partie importante de cette liquidité a été stockée à la BCE avec un cout de portage négatif pour les banques puisque ce qui a été emprunté au taux directeur central de la BCE (1% avant juillet 2012, 0.75% après) a été pour partie reprêté sur le bas de la fourchette des taux directeurs (0.25% avant juillet 2012, 0% après)

On est en tout cas toujours dans une situation irrationnelle puisque le montant des dépôts à la BCE évolue aujourd’hui autour de 230 Mds€. Rappelons qu’en période de fonctionnement tout à fait normal du marché monétaire avant la crise des subprime commencée à l’été 2007, les montants moyens déposés par l’ensemble des banques de la zone se situaient entre 100 M€ et 200 M€ seulement (nous avons bien dit Millions d’euros). Depuis 2007, les montants moyens déposés étaient de l’ordre de 50 Mds€ à 100 Mds€ (oui nous disons bien Milliards d’euros) en période de relative accalmie.

Banques centrales : poubelles du système financier mondial ?

la monétisation institutionnalisée condamne les banques centrales à devenir les poubelles du système financier international et, malgré l’opposition allemande , on voit mal la BCE y échapper

On pourrait donc penser que la situation de surliquidité des banques à la BCE sans être normalisée est redevenue moins irrationnelle (avec une chute des dépôts journaliers d’environs 600 Mds entre les plus hauts de mars 2012 et aujourd’hui). En réalité il n’en est rien puisqu’une bonne partie de cette liquidité stockée sous forme de dépôts à 24 heures a été transférée sur le poste « réserves excédentaires » des banques à la BCE qui, pour le coup, est passé d’un range de 100 à 200 Mds€ au premier trimestre 2012 à plus de 500 Mds€ en novembre 2012.

Même si cette liquidité du poste « réserves excédentaires » n’est pas stockée comme le sont les dépôts à 24 heures, cela ne veut pas dire pour autant que celle-ci a irrigué l’économie dite réelle : une banque a par exemple pu utiliser cette liquidité auprès d’une autre banque pour annuler une partie de ses dettes interbancaires ; laquelle liquidité a pu être à nouveau utilisée pour acheter auprès d’une troisième banque des emprunts d’état ou des titres corporate ; finalement d’un point de vue macroéconomique et surtout création de valeur, il ne se sera rien passé puisque cette troisième banque aura sans doute reprêté à la BCE la liquidité récupérée.

D’ailleurs, cette situation de surliquidité banque centrale (attention comme nous le verrons dans un article il existe plusieurs notions et définitions de la liquidité, ce qui peut nous permettre d’apprécier si oui ou non nous sommes en crise de liquidité) va conduire immanquablement un certain nombre d’établissements financiers à exercer pour tout ou partie leurs « Calls LTRO » à partir du 30/01/2013. En effet, à partir de cette date, les banques pourront chaque semaine rembourser une partie des LTRO de maturité 29/01/2015 et 26/02/2015 en informant une semaine à l’avance leur Banque centrale nationale. On reviendra plus précisément sur ce sujet dans de prochains papiers puisque cette échéance de fin janvier 2013 et les suivantes ne seront pas neutres sur le fonctionnement du marché monétaire de la zone Euro : les 2 LTRO représentent aujourd’hui plus des trois quarts de la liquidité fournie au système par la BCE.

- 3. La politique monétaire en matière de fixation des taux directeurs est inefficace confirmant ainsi le phénomène de trappe à liquidités qu’expérimente le Japon depuis plus de 20 ans. Des taux d’intérêt très faibles provoqueront tôt ou tard de fortes sorties de capitaux (fuite de capitaux aggravée pour les pays à croissance potentielle faible et à faible crédibilité de la politique économique). Ce phénomène entrainera une très forte dépréciation des devises à taux nuls au profit des devises à hauts rendements et donc une forte inflation importée en occident.

- 4. Et puis ces orientations de politique monétaire ultra-accommodante des banques centrales compliquent sérieusement la gestion de bilan des banques.
Certes les banques sont exposées négativement à la remontée des taux courts et ont donc profité des baisses de taux directeurs. Mais les banques, notamment françaises, peuvent finir par être pénalisées par une situation durable de taux courts très faibles surtout si, comme c’est le cas aujourd’hui, le coût des ressources dites réglementées (indexées sur le taux du Livret A) reste relativement inerte et se décorrèle du niveau des taux courts.

ALORS SUR QUOI DOIVENT SE CONCENTRER AUJOURD’HUI LES BANQUES CENTRALES

Plutôt que ces actions de monétisation, d’injections de liquidités en quantité illimitée ou de baisse des taux directeurs et de maintien de ceux-ci à des niveaux durablement très faibles, nous pensons que les banques centrales doivent renforcer un certain nombre d’actions structurelles. Nous en recensons deux principalement.

1. Régulation des activités de marchés inutilement risquées

Il n’est pas sur qu’une séparation brutale et « idéologique » entre activités de banque de détail et activités de banque de financement et d ‘investissement soit de nature à stabiliser les marchés financiers et l’économie. D’ailleurs lorsque l’on parcourt les éminents rapports sur cette question (Volcker aux Etats-Unis, Vickers au Royaume Uni et Liikanen pour la zone Euro puisque chaque zone y est allée de ses propositions), force est de constater que l’on n’est pas particulièrement convaincu par l’efficacité opérationnelle des recommandations prescrites.

Si l’on s’en tient à la zone qui nous concerne et donc au rapport Liikanen, il s’agirait de cantonner les activités de trading (sans qu’elles soient clairement définies) dans des entités légales séparées si elles sont supposées de trop grande taille (au dessus de 15 à 25% du total de bilan de la banque ou de 100 Mds €).
Nous sommes, en tout cas, en pleine actualité. Le texte du projet de loi française qui organise notamment la séparation des activités de trading de celles de dépôt des banques sera soumis ce 27/11 à l’avis du Comité consultatif de la législation et de la réglementation financière (l’ancien fameux CRBF pour Comité de la Réglementation Bancaire et Financière). Il serait confirmé que d’ici à juillet 2015, les banques devront avoir isolé certaines de leurs activités de marché dans des filiales séparées des dépôts.

Mais aussi bien pour le rapport Liikanen que pour le projet de loi du gouvernement français, les questions essentielles restent occultées

- a) Sur quelles ressources et fonds propres les activités filialisées seront adossées ? Si les activités de trading filialisées sont refinancées sur des ressources empruntées sur les marchés financiers, on ne diminuera pas (bien au contraire) les risques d’instabilité systémique

- b) Dans le même type de préoccupations, qu’en sera-t-il des mécanismes de solidarité qui ne remettent pas en cause les risques systémiques ? En effet, le mécanisme dit « de solidarité » prévu dans le projet de loi aurait pour effet de faire supporter à la faillite d’une banque à toutes les autres banques du pays

Le président de la Fédération bancaire française (la FBF) Jean Paul Chifflet met à juste titre en garde : « il faut absolument intégrer un plafond à ce mécanisme de résolution bancaire » Et il a raison car sans cela tous les pare-feux que l’on met en place ne serviraient à rien et l’on privilégierait comme c’est la cas depuis 5 ans dans des exemples de faillite bancaire l’investisseur aux acteurs suivants : actionnaires (par les recapitalisation dilutives ) ; contribuables (par des politiques fiscales toujours plus restrictives si l’état est in fine encore sollicité en dernier ressort)

Ce que l’on est finalement en droit d’attendre d’une banque centrale, c’est qu’elle impose des limites au poids de certains actifs inutilement risqués dans certains portefeuilles (en les pénalisant en termes de fonds propres consommés). En effet, les prises de positions purement spéculatives qui ne sont pas liées aux fondamentaux et qui déstabilisent les prix de marché sont liées à deux phénomènes :
- a) non seulement un environnement macroéconomique de forte création monétaire et donc d’excès de liquidité ;
- b) mais aussi des exigences de fonds propres insuffisantes sur certaines positions de marché.

Missions stratégiques des banques centrales : focus sur la BCE

Au-delà des mesures traditionnelles et dans un contexte de risques systémiques, interrogeons nous plus particulièrement sur ce que devraient être les missions stratégiques d’une banque centrale

Le rôle de la banque centrale est donc à cet égard essentiel et en tant qu’acteur majeur de la stabilité du système financier elle se doit d’être très proactive sur les deux origines des déstabilisations spéculatives : excès de liquidité et pondérations de fonds propres mal calibrées sur certaines activités de marché (ceci étant la généralisation de ce que l’on appelle le credit value adjustment sur les produits dérivés va dans le sens d’une plus grande sécurisation des activités de marché sensibles)

Il ne s’agit pas pour autant d’avoir une vision dogmatique "soviétique" sur les activités de marché et il est vital de faire la distinction entre les activités de marché socialement et économiquement utiles et celles qui le sont moins. Au risque de choquer – mais peu importe - il y a bien en effet une spéculation inutile (les autorités ne le diront pas comme cela) et dans le projet de loi que nous évoquions plus haut, un certain nombre d’activités rangées aujourd’hui sous la bannière de la Banque de financement et d’investissement seront « épargnées » par le cantonnement ou la filialisation : activités de tenue de marché, de compensation, de couverture (bonjour la définition des frontières entre la couverture pure et la spéculation pure ??) liées aux activités commerciales de l’établissement, de trésorerie pour le refinancement naturel des métiers commerciaux et sans doute d’investissement sur les marchés des excédents de ressources inemployés. Cela permettra en tout cas à beaucoup de se rendre compte que le monde de la banque et de la finance n’est pas aussi manichéen qu’on le décrit bien souvent dans les grands médias. Etait-il besoin de sortir un projet de loi supplémentaire pour comprendre la différence entre l’inutilité économique et sociale du trading algorithmique et du high frequency trading d’une part et la nécessité de maintenir des activités de market making sur les dettes publiques ou des activités d’origination sur les dettes de grands corporte internationaux sans oublier le maintien d’une activité d’ingénierie financière pour fabriquer des produits d’épargne à captal garanti.

2. Régulation des variations anormales de marché

Cela revient à gérer les déviations durables des prix des actifs par rapport aux fondamentaux qui ont des conséquences déstabilisantes pour l’économie : variabilité excessive de la demande, avec des effets de richesse négatifs ; excès d’endettement suivis de crises de solvabilité (entreprises télécoms en 2000, ménages américains subprime en 2006 , états périphériques de la zone Euro en 2010-2012) ; déformations anormales des conditions de compétitivité ; crises de balance des paiements de pays émergents dépendant de flux de capitaux à court terme volatils etc….
il est vrai qu’il est assez complexe de définir ce que peut être un prix élevé et personne n’est effectivement suffisamment omniscient pour ce faire. Il y a en plus le risque sérieux d’aléa moral qui pourrait venir perturber le fonctionnement plus ou moins "harmonieux" des marchés et également déresponsabiliser les investisseurs imprudents.

Il faut cependant (régulateur ou banque centrale) que sur certaines classes d’actifs et certains instruments des zones de surévaluation soient définies : par exemple des spreads de crédit sans aucun rapport avec la rémunération du risque. Pas facile donc de demander à la banque centrale d’être capable de « lutter » contre des surévaluations ou sous-évaluations d’actifs financiers. La banque centrale en effet n’est pas omnisciente mais a un avantage énorme par rapport aux investisseurs, traders et autres intervenants sur les marchés : elle est d’abord en principe insensible au mark-to-market (valorisations) des actifs qu’elle détient et ensuite en cas de perte avérée, il n’y a pas d’urgence à la recapitaliser comme pour une banque ou un assureur.

IL FAUT DONC FAIRE ECLATER LES MAUVAISES BULLES ET CONSERVER LES BONNES BULLES

Il est unanimement admis que les bulles sont dangereuses car déstabilisantes pour le système économique : une déconnexion significative de la valeur d’un actif financier par rapport à ses fondamentaux économiques se paie cher un jour ou l’autre (en destruction de valeur et malheureusement d’emplois..) Mais, en fait, les choses sont souvent moins triviales et à côté des bulles dangereuses, il existe des bulles tolérables. Tout dépend de la situation du taux de croissance de l’économie d’un pays et il faut savoir sur quel type d’actif porte cette bulle.

- a) Si la bulle porte sur des actifs non productifs (type immobilier) dans des pays en situation d’excès de capital productif, comme cela est le cas de nombreux émergents, alors il n’y a pas de danger imminent (on assiste juste à un rééquilibrage des excédents d’épargne) et en ce sens les craintes sur les conséquences d’un krach immobilier en Chine sont excessives.

- b) Si à l’opposé, la bulle porte sur des actifs dits productifs dans des pays en situation de déficit de capital alors là aussi n’y a pas de danger imminent puisque la valeur des entreprises s’accroît et donc leur capacité d’investir.

- c) les bulles dangereuses sont donc celles qui consistent à investir dans des actifs improductifs dans des pays en situation de déficit de capital alors que le taux de croissance est faible et qu’il y a insuffisance de capital productif dans l’économie : Cf le Japon du début des années 1990 avec l’immobilier, les Etats Unis et certains pays européens (Espagne, Irlande…) avec différentes formes d’immobilier subprime entre 2005 et 2007.

On sait que les marchés ont absurdement surévalué certains prix d’actifs financiers et ont ensuite précipité les crises quand ils se sont aperçus de la dérive criante entre la réalité économique et la valorisation des actifs financiers en question.
Pour comprendre pourquoi les surévaluations/bulles d’actifs financiers existent, il faut connaitre les principes qui guident les investisseurs

  • D’abord la « cupidité » (ou dit autrement, les exigences encore irréalistes de ROE que l’on attend d’eux) ;
  • Ensuite le mimétisme qui conduit tous les investisseurs à faire la même chose en même temps aussi bien pour des raisons réglementaires (ce qui est un comble) que pour des raisons comptables (merci les normes IFRS pro-cycliques) ;
  • Enfin et surtout les investisseurs-traders vous diront qu’il faut bien investir quelque part toute la liquidité excessive fournie par les banques centrales.

Les choses paraissent donc simples sur le papier pour empêcher les crises sur les marchés financiers provoquées par les bulles d’actifs :

  • mettre un terme à la cupidité (enfin plutôt l’atténuer) en remettant en cause certains objectifs de rentabilité irréalistes (mais qui va oser proposer cela ?), certains modes de rémunération et une philosophie du benchmarking qui conduit à ne pas chercher à être forcément efficace et performant mais à faire moins pire que le voisin ou concurrent ;
  • éviter que les normes prudentielles et comptables soient trop pro-cycliques (là encore est ce politiquement correct d’annoncer que le référentiel Bale 3 ou les normes IFRS sont économiquement inefficaces ?)
  • remettre en cause les politiques monétaires ultra-accommodantes d’accroissement illimité de la liquidité banque centrale (mais comment imaginer une banque centrale avoir le courage de commencer à reprendre de la liquidité aux banques en stérilisant réellement la masse monétaire)

Alors oui tout cela nécessite un courage inhabituel, mais la sortie de crise (sans remise en cause populiste du système) est à ce prix Et au total, il ne faut pas perdre de vue comme nous l’avons développé plus haut que les investisseurs « lucides » doivent pouvoir être aidés par les banques centrales autrement qu’aujourd’hui. Plutôt que de monétiser systématiquement les dettes publiques et d’inonder les marches interbancaires de liquidité – on a vu finalement à quel point les LTRO avaient été économiquement inutiles - il serait donc plus judicieux d’orienter le jugement des investisseurs sur la surévaluation justifiée ou non de certains actifs financiers.

Mory Doré Décembre 2012

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